Le MBA Management de la Sécurité : prendre du recul pour préparer la sécurité de demain

Par Lola BRETON

« Intégrer le MBA Management de la sécurité, c’était sortir de ma zone de confort, confie Rudy Ropital, chargé de mission au service du Haut Fonctionnaire de Défense et Sécurité du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire (MTES). « Ce n’est pas toujours agréable, mais pour être efficace et opérationnel, c’est essentiel ». Cette formation délivrée par la Gendarmerie, en partenariat avec l’Université de Panthéon-Assas et HEC Paris, permet en effet aux auditeurs de sortir de leur quotidien et de prendre du recul sur les besoins en sécurité dans leur secteur d’activité. Cybersécurité, géopolitique changeante, etc. : le MBA ouvre de nouvelles portes pour anticiper l’avenir et améliorer sa réactivité face aux bouleversements technologiques et aux menaces inédites.

Rencontre avec le chef d’escadron Rudy Ropital en mobilité au Département de la Sécurité Nucléaire du MTES, auditeur de la 5e promotion.

Un profil atypique pour le MBA

Comme chacun des auditeurs du MBA de l’EOGN, Rudy Ropital a mis son expérience au service de la formation. Près de 20 ans après avoir embrassé la carrière militaire et avec 15 ans d’opérationnel à son actif, son profil a permis de représenter auprès des autres auditeurs du MBA un service de Haut Fonctionnaire de Défense et de Sécurité. « La sécurité est présente dans tous les ministères, au-delà des frontières du ministère de l’Intérieur », souligne celui qui, au département de sécurité nucléaire du MTES, contrôle notamment les activités de transports de matières nucléaires.

Dans le cadre d’un partenariat avec le MBA, ce département a notamment accueilli la promotion pour trois jours de découverte de la sécurité appliquée aux installations et transports nucléaires. « Lors d’une visite de site, les auditeurs ont ainsi pu voir comment un grand groupe industriel met en œuvre une stratégie de sécurité sous le contrôle du régulateur », explique le commandant Ropital, Il n’est pas courant qu’une administration centrale fasse aussi du contrôle sur le terrain. C’est une des spécificités de ce département. « Ma présence permet aux jeunes officiers de gendarmerie du MBA de faire l’expérience d’un autre exercice de l’autorité de l’Etat ».

Une montée en compétences plébiscitée

« Il faut agir en homme de pensée et penser en homme d’action » disait Bergson. Pour Rudy Ropital, le MBA de l’EOGN permet exactement cela : mener des hommes et des femmes tournés vers l’action à avoir une approche réflexive, en prenant du recul sur les situations opérationnelles dans lesquelles ils sont, d’habitude, impliqués.

« Le MBA permet de sortir de son quotidien pour se rénover », apprécie le commandant Ropital pour qui cette formation était une opportunité à saisir. « La Gendarmerie a toujours été à des carrefours : entre plusieurs missions, au contact de plusieurs autorités (préfets, procureurs maires…) et partenaires (dirigeants d’entreprises, collectivités territoriales…), etc. Pour que ces cadres participent toujours mieux à la vie de l’État et améliorent les synergies sur le terrain, elle renforce, avec cette formation, ce statut unique. C’est aussi pour cela qu’elle accepte d’externaliser ses hommes et femmes ! » explique Rudy Ropital. Avant d’intégrer le MTES, le commandant nourrissait déjà l’envie de coopération accrue et de dialogue avec d’autres instances. En poste dans l’Hérault, en tant que commandant de la compagnie de Gendarmerie de Béziers, il avait notamment pu développer un important travail partenarial au profit du territoire. « J’aime avoir ce rôle d’interprète, être celui qui met en lien plusieurs acteurs pour un but commun. » Le MBA Management de la Sécurité est donc l’occasion de « monter en compétences, d’abord, et de développer son réseau, ensuite », souligne Rudy Ropital.

Poser un œil nouveau sur les enjeux de sécurité nucléaire

Avec le recul permis par le MBA et par la rédaction d’un mémoire sur la sûreté des transports de marchandises dangereuses, Rudy Ropital a pu réfléchir au futur de la sécurité nucléaire et à ses besoins. C’est notamment en suivant le module portant sur la cybersécurité qu’il a décidé d’ajouter une brique cyber à la stratégie de contrôle des transports. « Prendre en compte la dimension cyber est essentielle pour le futur du secteur. Avec l’arrivée des véhicules connectés/autonomes, il faut absolument anticiper les risques inhérents à des transports non-pilotés par l’homme », souligne le commandant.

Rudy Ropital a également pu réfléchir aux besoins de formation qui parcourent le secteur de la sûreté en général. Ces besoins sont multiples. « Il faut développer la culture de sûreté des acteurs du transport de matières dangereuses, explique le chef d’escadron. Aujourd’hui, ils sont davantage formés aux risques accidentels, moins à la malveillance – dont fait partie la menace interne ! ». Par ailleurs,le fait que l’activité de transport soit très ouverte et internationale rajoute de la complexité dans les enjeux de sûreté. « Dans un secteur aussi sensible, la gestion d’un acte de malveillance nécessite une certaine maîtrise d’une langue permettant d’interagir efficacement avec les autorités locales.», note Rudy Ropital. Ces deux éléments ne sont pas sans rappeler des problématiques auxquelles la sécurité privée – secteur avec lequel le commandant Ropital collabore également – fait face : « La sécurité privée doit encore améliorer son offre pour pouvoir fournir des prestations de plus haute qualité. Il est clair que c’est une aide dont on ne pourra, de toute façon, plus se passer ! » La sécurité nucléaire se pose d’ailleurs en précurseur puisqu’elle recrute des agents civils armés pour protéger ses sites.

Le futur de la sécurité dans les transports de matières dangereuses passe, selon Rudy Ropital et son travail de mémoire, par « l’objectivation et la détermination d’un juste niveau acceptable des risques. Il nous faut parvenir à mieux déterminer quels sont les risques que nous sommes prêts à acceptés en matière de transports de matières dangereuses. Pour cela, nous devons trouver une meilleure synergie sur ce sujet avec les réseaux scientifiques et techniques», explique Rudy Ropital.

Quant à son futur, Rudy Ropital est désormais prêt à s’engager dans une nouvelle aventure. Il devrait rejoindre l’année prochaine le Royaume-Uni pour y suivre le Strategic Command Course du College of Policing aux côtés des futurs chefs de police britannique. Le chef d’escadron pourrait ainsi poursuivre son rôle d’interprète, outre-Manche, au carrefour de plusieurs cultures, et nourrit l’espoir, d’un jour, rejoindre une ambassade en qualité d’Attaché de Sécurité Intérieur adjoint.