Agenda technologique et industriel : quelle place pour la souveraineté numérique ?

Face aux géants américains du numérique et aux puissances que sont la Russie et la Chine, la France et l’Union Européenne doivent prendre conscience de l’importance de dresser un agenda technologique et industriel ambitieux capable de surmonter les enjeux qui nous font face. C’est notamment le constat de la commission d’enquête, dirigée par le sénateur Montaugé, président de la commission d’enquête du Sénat sur la souveraineté numérique, qui préconise de renforcer la souveraineté numérique nationale. L’explosion du monde numérique remet en cause notre défense, notre ordre juridique, notre base économique, et notre système fiscal et monétaire. Pour faire face à ces défis et répondre aux besoins croissants d’économies dans une société en pleine transformation numérique, les États doivent définir des priorités technologiques et les traduire en mesures actionnables sous forme de politiques industrielles.

Par Simon DOUAGLIN & Mélanie BENARD-CROZAT

Définir une « stratégie nationale numérique » impulsée par un forum institutionnel temporaire est une priorité pour la France, rappelle le rapport des sénateurs Longuet et Montaugé. Par ailleurs, une loi d’orientation et de suivi de la souveraineté numérique pourrait être créée sur le modèle de la loi de programmation militaire, toujours dans un souci d’inscrire cette souveraineté dans le temps long.

A court terme, les préconisations portent sur l’utilisation de l’outil juridique pour adapter la réglementation aux enjeux ainsi que sur le levier de l’innovation, française et européenne, qu’il est crucial de favoriser. L’Union Européenne participe à soutenir cette innovation dans le cadre du programme Horizon 2020 et de la stratégie Horizon 2021 à 2027, qui visent, par le biais de financement public, à favoriser le développement de technologies européennes et à dynamiser l’industrie numérique européenne. La nouvelle commission européenne, dirigée par Ursula von der Layen depuis le 1er décembre, a notamment dévoilé son programme pour intégrer les nouvelles innovations numériques aux grands axes de développement de l’Union Européenne.

Quelles priorités technologiques pour la nouvelle commission européenne ?

La nouvelle commission européenne a présenté son agenda technologique. L’accent est mis sur « la prochaine génération de géants du numérique » afin de fonder « une Europe adaptée à l’ère du numérique ». La commission insiste sur l’importance d’investir dans la nouvelle génération de technologies parmi lesquelles la 5G, la blockchain, l’intelligence artificielle, le big data, le calcul à haute performance, les algorithmes, les outils de partage et d’exploitation des donnéesou encore l’informatique quantique. La maîtrise de ces technologies représentera un atout majeur pour l’avenir de l’Europe et pourrait permettre de faire émerger de futurs géants européens du numérique.

« La responsabilité des dirigeants politiques et économiques est didentifier à la fois les domaines stratégiques et critiques qui sont importants aujourd’hui et qui pourront devenir critiques demain. Parmi eux, la cybersécurité, l’intelligence artificielle ou encore le stockage énergétique car il est clé dans un monde où l’énergie et les besoins sont de plus en plus décentralisés et clés pour la mobilité et lautonomie, sur terre, sur et sous les mers et dans les airs. » explique André Loesekrug-Pietri, Former Special Advisor of the French Minister of Defence, Chair of the Joint European Disruptive Initiative.

Les investissement sont essentiels « mais plus que les milliards, cest la méthode employée qui compte. Nous n’avons pas de marché commun du digital, nous saucissonnons toujours autant les budgets, et les fonds nationaux ou européens sont toujours autant empreints de saupoudrage. Nous avons besoin dune Europe qui décide vite, qui investit dans l’excellence et qui prend des risques ! » ajoute André Loesekrug-Pietri qui appelle à lancer de Grands Défis Technologiques de manière ciblée sur les secteurs stratégiques pour repousser les frontières de l’innovation et reprendre l’avantage. « Il faut profiter de cette accélération technologique pour repasser en tête. Nous sommes résolument optimistes sur le fait que la France et lEurope peuvent le faire, faire du leapfrogging dirait-on outre atlantique. » ajoute t-il.

Autre enjeu, le normatif. L’importance toujours plus grande que prend l’intelligence artificielle dans la gestion du big data nécessite en effet un projet de législation qui sera présenté par la Vice-Présidente exécutive et commissaire en charge de la concurrence, Margrethe Vestager. Ce projet de loi, intitulé Digital Services Act, viendra mettre un terme aux barrières réglementaires existantes entre les pays au sein de l’Union Européenne, complétant ainsi le marché unique numérique.

Pour inscrire l’Union Européenne dans la dynamique numérique mondiale, la nouvelle commission dispose de plusieurs leviers. Forte du succès du RGPD instauré par la commission Juncker, cette dernière pourrait utiliser la norme pour asseoir la souveraineté européenne. L’objectif est d’encadrer les activités actuelles des géants du numérique en Europe et d’anticiper les nouvelles activités émergentes ou en devenir. De plus, la commission européenne usera de la taxation comme outil souverain, tel que présenté sur la lettre de mission de Margrethe Vestager où l’enjeu est clairement affiché : « […] trouver un consensus au niveau international d’ici la fin 2020 ou proposer une taxe européenne juste ». Enfin, par l’éducation au numérique, la nouvelle commission veut inscrire le développement technologique et numérique dans une politique de long terme. La sensibilisation des nouvelles générations, qui représentent un « moteur de la compétitivité et de l’innovation en Europe », favorisera un développement pérenne de l’économie du numérique dans les années à venir.

Technologies et industrie du numérique : le défi de l’optimisation des investissements

« […] Il faut veiller à ne pas brider l’innovation car elle est source de valeur et demploi. » explique le sénateur Montaugé. La French Tech doit par ailleurs être un moyen de valoriser cette innovation en faisant émerger les licornes européennes, encore trop peu nombreuses. Parmi plus de 400 licornes estimées dans le monde, 5 seulement seraient françaises contre 165 pour les Etats-Unis et 90 pour la Chine1. L’enjeu pour la France va donc être de favoriser leur émergence et d’accentuer leur accompagnement. Lors du lancement du France Digitale Day le 17 septembre 2019 dernier, le président Macron a fixé le cap des 25 licornes françaises pour 2025.

« L’achat public est toujours un moyen mais les enjeux économiques dépassent largement ce champ. » explique le sénateur. Ainsi, l’Etat doit continuer à agir en définissant les grandes orientations technologiques. La 5G est un enjeu majeur « qui va conditionner pour une bonne part la compétitivité de nos entreprises. » prévient le sénateur. Prenant l’exemple des Etats-Unis, il revient sur le rôle central de l’Etat dans l’avancée technologique et industrielle : « […] la puissance publique états-unienne a été déterminante dans la réussite de ses entreprises. » Le public a en effet un rôle clé à jouer en se concentrant« sur tout ce qui est trop risqué ou trop long terme pour le secteur privé. » explique André Loesekrug-Pietri et d’ajouter « En Chine, lEtat agit de manière darwienne en faisant émerger des champions mais qui ensuite bénéficient dun immense marché national où ils se retrouvent de facto en situation de monopole. Aux Etats-Unis, le public pousse, avec la Darpa ou la NSF, les ruptures jusqu’au stade de prototype, ou bien en faisant un dealcomme la Nasa avec SpaceX qui a permis à Elon Musk d’exploiter au niveau des marchés civils les développements obtenus dans le cadre de contrats publics ou militaires. » Nous avons besoin d’un Etat stratège, « qui se concentre sur les secteurs ou personne dautre ninvestit, et non pas un Etat qui devient omniprésent dans léconomie. Il faut enfin réaliser au plus vite un marché unique européen, sans lequel nous naurons jamais la masse critique. » clame t-il.

Constatant le très haut niveau de la recherche publique française, le sénateur souligne également que les projets de coopération doivent être « renforcés et multipliés » enmettant l’accent sur l’importance de la coopération public-privé. C’est ainsi tout l’enjeu du Small Business Act américain qui vise à soutenir les petites entreprises en leur réservant une part de l’achat public. Le ministère des Armées a notamment initié cette démarche envers les PME et les ETI.

De plus, « […] la France devrait financer beaucoup plus de doctorants quelle ne le fait actuellement […]. » ajoute le sénateur du Gers. C’est un effort financier important mais indispensable pour l’avenir de la filière. A titre d’exemple, le philosophe Bernard Stiegler, spécialisé dans le développement technique estime à 500 le nombre d’étudiants en thèse qui seraient nécessaires chaque année pour assurer les projets de recherche sur les nouveaux enjeux du numérique.

Face à la concurrence technologique et industrielle des Etats-Unis et de la Chine en matière de numérique, plusieurs entreprises dont le groupement Hexatrust appelle l’Europe à devenir « un continent numérique résilient et innovant ». Lors de l’université d’été 2019 de l’association, intitulée « Vers une autonomie stratégique européenne », Bernard Barbier, ancien directeur technique de la DGSE, insistait sur l’importance de construire une voie européenne en pointant notamment la menace chinoise qui se substitue à la menace américaine. « On passe dune dépendance à Cisco à une dépendance à Huawei. » explique t-il.

Face aux menaces de colonisation étrangères, Bernard Barbier soutient l’initiative franco-allemande JEDI qui vise à favoriser l’innovation disruptive numérique européenne. Celle-ci a en effet pour objectif, par le financement public, de faire émerger des alternatives technologiques européennes crédibles.

André Loesekrug-Pietri ajoute « Il ne faut manquer aucune occasion rappelez-vous de lirruption du big data analytics notamment avec le terrorisme – pour faire émerger des champions européens non pas en les subventionnant mais en leur donnant très vite leur chance et des contrats! Une société technologique a plus besoin de contrats récurrents que de ‘démonstrateursou de subventions. Et pour cela nos modes dachats doivent être radicalement reformés. Il faut imposer qu’un acteur européen soit systématiquement dans les short lists, financer beaucoup plus rapidement la R&D des acteurs sollicités, ce qui permettra à tous, acteurs existants comme nouveaux entrants parfois plus innovants, de proposer de réelles innovations au bénéfice de tous. Enfin, il faut exiger de tous les fournisseurs que les solutions quils proposent soient évolutives et compatibles avec les innovations futures et enfin développer des achats publics agiles et stimulant la modularité et le travail en écosystème. »

De nombreux acteurs du privé se concertent et échangent sur les dispositions à prendre pour accompagner l’édification de modèles français et européens et favoriser l’émergence d’offres souveraines basées sur des innovations technologiques de référence mais également en s’appuyant sur des valeurs éthiques et de confiance. « C’est ce à quoi sapplique le cluster Data Intelligence, créé dès fin 2016 sous le pilotage du GICAT, réunissant 24 acteurs industriels français innovants. »souligne Luc Manigot, directeur des opérations de Sinequa, membre du cluster et de poursuivre « L’offre proposée par ce cluster est articulée autour d’un catalogue de solutions allant des capteurs aux data center mobiles, en passant par des logiciels danalyse, des calculateurs hautes performances, du stockage de données dans des clouds de confiance ou des coffres-forts souterrains.Des solutions portées à la fois par des PME et des Grands groupes » qui entendent adresser le marché national et européen tout autant que conquérir les marchés internationaux.

Confiance numérique et souveraineté : la maîtrise des données

« La souveraineté, c’est la maîtrise totale du cycle de la donnée depuis celui qui la stocke jusqu’à celui qui la consomme, en passant par les étapes de transformation grâce à des algorithmes de traitement de données. » explique Luc Manigot. Une maîtrise désormais essentielle, pilier de la confiance numérique qui passe par une connaissance et une identification des données dont on dispose. Compte tenu aujourd’hui de la masse de données existantes, de leurs constante augmentation, et d’un flux incontestablement appelé à se multiplier dans l’avenir, la tâche est ardue.

Les données doivent donc être fouillées en profondeur pour être identifiées et classées. « Nous fournissons à nos clients, pour beaucoup très sensibles, un outil de recherche et d’analyse qui permet cette fouille de données en contexte et à très grande échelle. La plateforme de recherche puis danalyse cognitives associe différentes technologies : un puissant moteur de recherche multilingue et une analyse de contenu approfondie sur des données massives et hétérogènes grâce à une connectivité établie à plus de 180 types de sources de données. » détaille Luc Manigot. Editeur de Logiciels français, Sinequa propose un progiciel qui intègre différents algorithmes combinant analyse linguistique, machine learning et deep learning afin d’aider à identifier et classer les contenus et à en détecter les informations cachées et relations implicites. « Nous livrons un logiciel danalyse au coeur duquel, il appartient à nos clients dinjecter leurs données, de le paramétrer en fonction de leur métier et den exploiter les résultats. Ceux-ci restent ainsi maîtres de leurs données. » souligne Luc Manigot.

La solution permet d’extraire rapidement des informations de valeur depuis une multitude de sources de données complexes et variées dans le but de fournir des informations contextualisées et pertinentes. « Avec lapport du Machine Learning, le Cognitive Search offre de nouvelles possibilités pour améliorer continuellement la pertinence des résultats et de nouvelle fonctionnalités de traitement automatique. » ajoute Luc Manigot. L’assistance d’une intelligence artificielle représente ainsi un atout concret dans l’accompagnement du traitement des données à grande échelle tout autant que dans un objectif de réduction des risques opérationnels. L’intelligence artificielle ouvre des perspectives nouvelles dans l’analyse des données opérationnelles à partir de tout type de sources privées ou publiques. Par exemple, l’exposition au risque peut ainsi être réduite. « Les cas dusage sont multiples: Recherche dexpertise, détection de signaux émergents, levée d’alerte proactive, renseignement de toute nature. Lobjectif est daider le commandement ou les instances dirigeantes à prendre les bonnes décisions, le plus rapidement possible. » précise Luc Manigot. Conçu pour des déploiements larges  et internationaux, à la fois dans des data center propres aux organisations pour des raisons de souveraineté et / ou hébergées dans le cloud, Sinequa peut explorer et indexer tous les gisements utiles. « L’architecture de grille de Sinequa fournit un moyen efficace d’étendre, d’intégrer et de distribuer des données massives et hétérogènes tout en garantissant à chaque utilisateur le respect des règles de sécurité, de confidentialité et ses droits daccès. » ajoute t’il et de conclure « La plateforme est autonome et efficiente, mais l’humain reste dans l’immense majorité des cas le seul porteur des décisions importantes. »

Cloud computing : définir un cap pour une souveraineté numérique

« La souveraineté nationale fonde le pacte républicain, pacte par lequel le citoyen accepte une discipline collective fondée sur la loi, en contrepartie dune protection. » rappelle le rapport Montaugé. La souveraineté est une question centrale en matière de numérique car elle questionne la place de l’Etat et de l’Union Européenne dans la protection numérique et dans l’implantation des datacenters. « L’Etat doit par exemple se doter rapidement dune doctrine en matière dimplantation de datacenters sur les territoires. »indique le sénateur Montaugé et d’ajouter : « Nous préconisons aussi que le RGPD soit étendu aux données stratégiques des personnes morales que sont notamment les entreprises, en contrepoint du Cloud Act par exemple. » L’expert en protection des données et président de PersonalData.IO, Paul-Olivier Dehaye souligne l’enjeu majeur pour l’Etat de « créer de bonnes dynamiques de compétitions entre les entreprises ». Toutefois, il insiste sur l’importance pour l’Etat « de ne pas devenir omnipotent et de garantir une liberté fondamentale aux citoyens. »

Le cloud et la donnée, bien commun placé au centre des préoccupations, figurent au cœur de la stratégie numérique du ministère des Armées orchestrée par la DGNUM. La massification des données à stocker et l’évolution de notre société rendent indispensable l’utilisation du cloud, y compris dans le domaine militaire. Le développement de la confiance numérique est un aspect important de l’émergence d’un « cloud de confiance » capable de relever deux défis : « la confidentialité des données et l’indépendance numérique nécessitant une exigence forte de transparence. » souligne l’Amiral Coustillière, DGNUM du ministère des Armées. Cependant, l’utilisation massive du cloud computing comme alternative de stockage de données a accentué la dépendance des pays européens aux grands hébergeurs américains qui possèdent à eux-seuls la plupart des serveurs de stockage des données. Constatant l’absence, en Europe, d’une offre « cloud de confiance » adaptée aux besoins spécifiques du ministère des Armées et de l’Etat en général, le défi est de proposer une offre agrégée recouvrant les besoins d’un ensemble d’utilisateurs dont les ministères pour leurs informations sensibles afin de favoriser l’émergence d’acteurs européens sur la scène internationale. Afin d’amener les acteurs économiques à l’échelle, l’achat public pourrait être un outil de souveraineté si des dispositions légales étaient prises pour le stockage et le traitement de ces données. A l’avenir il faut donc, d’une part faire évoluer la législation dans ce sens et d’autre part, accompagner le retour des acteurs qui sont déjà hébergés sous juridiction étrangère et qui se trouvent souvent dans une situation d’irréversibilité. 

« Le ministère des Armées développe depuis le livre blanc de 2008 une souveraineté numérique au travers de la maîtrise de lespace numérique, une force de combat et une capacité de cyberdéfense. » développe l’Amiral Coustillière. Institution régalienne par excellence, dernier rempart lorsque la Nation est attaquée, la résilience du ministère, dont la confidentialité de ses données, est un enjeu majeur. Si le cloud public est peu utilisé, le ministère disposera d’un cloud privé opérationnel : « un cloud combat et un cloud renseignement ». Mais cette architecture se heurte à la problématique des compétences. Une troisième et nouvelle voie s’ouvre donc avec le cloud dédié qui permet une protection supplémentaire, puisque les données sont entièrement cloisonnées par rapport à celles des autres clients. « Compte tenu du degré de confidentialité de nos données, de notre politique de sécurité interne très stricte et de nos obligations vis à vis de partenaires stratégiques, cette nouvelle option est très intéressante. » ajoute l’Amiral Coustillière.

Une solution d’hébergement qui implique une coopération avec des acteurs économiques de confiance, donc soumis exclusivement au droit national et européen.

Des acteurs que l’on peut notamment retrouver engagés au coeur du Contrat Stratégique de Filière (CSF) des industries de sécurité, qui s’inscrit dans une démarche souveraine et offensive, valorisant la compétitivité des entreprises au service de l’indépendance de la France dans le domaine du numérique. Au coeur du CSF, 5 axes majeurs dont celui dédié au « cloud de confiance » piloté par OVH en binôme avec Oodrive.

L’objectif de ce projet est de favoriser la sécurité aussi bien des données et des infrastructures avec la naissance d’un « cloud de confiance ». Ce sujet entend s’appuyer sur une législation défensive et un courage politique qui visent tous deux à s’opposer à la portée extra-territoriale des lois américaines qui sont avant tout, muées par des intérêts économiques. « Le juridique est une arme économique pour les Etats-Unis. » rappelle Edouard de Rémur, directeur général de l’entreprise Oodrive car « si la souveraineté s’illustre par une maîtrise des technologies, c’est également par la loi qu’elle s’affirme. » complète l’Amiral Coustillière.

Au-delà des champions nationaux, les entreprises de taille plus modeste jouent également un rôle majeur dans cette bataille, à l’image de Oodrive, ETI spécialisée dans la gestion du document sensible et dans les solutions pour le partager, le sauvegarder et le sécuriser. Depuis bientôt 20 ans, cette entreprise accompagne des PME, des ETI et près de 90% du CAC 40, pour les aider à protéger, à partager et à signer leur documents les plus sensibles.

Labellisé « SecNumCloud » par l’ANSSI et disposant de la certification IDAS, Oodrive répond donc aux exigences de performance et de confiance afin de sécuriser toutes données sensibles. De plus, la norme ISO 27001, comme socle de ce label, garantit la mise en place d’un système de management de la sécurité de l’information (SMSI) sécurisant le système de stockage des données. « Bien entendu favoriser la commande publique pour les PME innovantes est importante. Le ministère des Armées fait déjà beaucoup en ce sens. Mais je crois aussi beaucoup au pouvoir des labels et des certifications PASSI, SecNumCloud, etc. pour se distinguer. » explique l’Amiral Coustillère et d’ajouter « Il est essentiel aujourd’hui d’accompagner les entreprises dans le développement de véritable marketplaces accueillant des services en mode SAAS hébergés chez des partenaires Cloud de confiance. » Et Edouard de Rémur de rappeler « Nous travaillons au sein du CSF à l’émergence de solutions interopérables et d’offres agrégées. C’est ainsi que nous verrons des champions européens émerger. Mais n’oublions pas que la commande publique est aujourd’hui, même si elle n’est pas le seul levier, un axe important dans le développement des entreprises nationales, mais aussi pour le développement de la filière et donc le développement économique de notre pays. Le numérique est une filière d’avenir, notamment créatrice d’emplois à valeur ajoutée. L’Etat doit donc faire preuve de courage sur ce sujet et apporter plus de cohérence entre les investissements, les POC et les commandes passées… »

Le Cloud représente des opportunités de développement économique fort pour la France et l’Europe tant les entreprises et les institutions « ont besoin de se protéger, en matière dintelligence économique dans cet espace de conflictualité quest devenu le numérique. » ajoute enfin l’amiral Coustillère.

Un projet franco-allemand se développe en ce sens afin de créer une alternative crédible aux GAFAM qui pourrait à terme devenir un véritable projet européen. « Nous voulons […] que ce travail pour le stockage des données sensibles se fasse à l’échelle franco-allemande et peut-être que demain à l’échelle européenne, ce qui suppose que les entreprises françaises et les entreprises allemandes […] travaillent ensemble sur cette question du stockage des données les plus sensibles. » indiquait Bruno Le Maire lors de son allocution au Lab IA Criteo en octobre dernier. Un projet « intéressant » souligne Edouard de Remur, mais qui reste malgré tout « assez flou, notamment en matière de souveraineté. » Reste enfin la question des applicatifs SAAS. «  Nous navons aucune visibilité sur la manière dont les éditeurs SAAS pourront intégrer ce projet, et cest un point essentiel pour le succès dun tel projet. » souligne-t-il.

L’autonomie stratégique de la France et de l’Europe est possible« car nous avons les talents et la vision. Il nous faut àprésent prendre le risque de travailler différemment, en associant vision long terme du public, un renouveau de notre capacité à prendre des risques majeurs, avec l’agilité de l’écosystème de linnovation. » conclut André Loesekrug-Pietri.

1 https://www.cbinsights.com/research-unicorn-companies