Réseau radio numérique des services de secours : l’avenir du réseau qui suscite des inquiétudes.

Pour les SDIS ayant terminé leur migration, le service rendu est inférieur à celui escompté, pour un coût pourtant plus élevé.

Jean Pierre VOGEL (Les Républicains – Sarthe), rapporteur spécial du programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités », a présenté à la commission des finances, réunie le 3 février 2016, les conclusions de son contrôle portant sur le programme ANTARES, qui vise à mettre en place un réseau radio numérique pour les forces de secours.

Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, le passage au numérique des sapeurs‑pompiers et des SAMU est apparu indispensable pour permettre aux forces de sécurité et de secours d’intervenir de manière concertée et sécurisée, tout en offrant aux services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) de nouveaux services de voix et de données adaptés à leurs besoins. S’agissant du déploiement, le taux d’adhésion satisfaisant à ANTARES ne saurait masquer les difficultés importantes rencontrées par les SDIS. La persistance de « zones blanches » où la couverture est insuffisante et l’extinction du fonds d’aide à l’investissement (FAI) mis en place par l’État rendent incertain l’achèvement de la migration et sont à l’origine d’importantes inégalités entre les SDIS.

Un bilan contrasté

Dix ans après l’adoption de la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, le bilan est très contrasté. Pour les SDIS ayant terminé leur migration, le service rendu est inférieur à celui escompté, pour un coût pourtant plus élevé. À la suite de la migration, plus d’un SDIS sur trois a ainsi constaté une détérioration de la couverture du réseau, tandis que la qualité de la maintenance est jugée insuffisante. L’interopérabilité entre les départements n’est pas assurée. Il est impossible d’utiliser des terminaux à bord de la flotte aérienne. Les relations avec les services d’aide médicale urgente (SAMU) sont difficiles.

Un remède à 200 millions d’euros

Au-delà de son fonctionnement, c’est également l’avenir du réseau qui suscite des inquiétudes. Alors que la situation financière des départements est particulièrement fragile, un investissement supplémentaire est nécessaire pour prévenir l’obsolescence du réseau, pour un montant compris entre 150 et 200 millions d’euros. Pendant cette phase de modernisation, qui devrait durer six ans, le fossé existant entre les réseaux mobiles commerciaux et le réseau régalien des forces de secours continuera de se creuser. Si l’annonce d’un saut technologique vers les réseaux de quatrième génération (« 4G ») apporte une réponse à ce défi, il ne devrait intervenir qu’à l’horizon 2030.

Compte tenu des contraintes budgétaires, la migration vers la 4G ne pourra pas être réalisée dans les mêmes conditions financières pour les SDIS. Une solution pourrait consister à associer certains opérateurs d’importance vitale à ce nouveau réseau, afin d’en réduire le coût pour l’État et les collectivités territoriales.

L’horizon de la migration semble difficilement compatible avec les calendriers des grands opérateurs privés qui pourraient être associés au nouveau réseau afin d’en réduire le coût pour l’État et les collectivités territoriales.

Dans ce contexte, Jean Pierre VOGEL émet quinze recommandations.

Parmi les plus significatives, le sénateur invite à poursuivre les investissements en cours visant à optimiser la couverture du réseau ANTARES afin de limiter le phénomène des « zones blanches » et de faciliter l’achèvement de la migration des SDIS.

Il recommande de sensibiliser les ARS à la nécessité de renforcer les effectifs dédiés au traitement des bilans afin de rendre possible leur transmission systématique par le biais d’ANTARES, de mettre en place un comité des utilisateurs de l’INPT afin de faire état des besoins, des attentes et des propositions d’amélioration des utilisateurs au comité de pilotage.

Selon lui, il faut mobiliser les ressources internes des SDIS en matière de maintien en condition opérationnelle, en contrepartie d’une modulation de leur contribution, afin de favoriser les économies d’échelle ; et systématiser les démarches de mutualisation entre les services utilisateurs.

Il appelle également à travailler en coopération avec l’industriel pour alléger les contraintes liées à la crypto-période afin de limiter son impact budgétaire pour les SDIS.

Enfin, dans la perspective du saut technologique vers la 4G, il appelle à mettre en place une gouvernance adaptée afin d’assurer un suivi des expérimentations en cours et de recueillir les besoins des utilisateurs potentiels.

Maximiser l’intérêt opérationnel d’ANTARES, concrétiser les pistes d’économies et rénover la gouvernance du programme pour préparer la migration vers la 4G… autant de défis ambitieux à relever.