Co-construire avec les établissements sportifs existants : un schéma win-win

Alors que les Jeux Olympiques ont longtemps été critiqués pour leur coût exorbitant, l’un des arguments phares de la candidature de la France pour l’organisation des JOP 2024 était l’utilisation des installations sportives existantes ou dont la construction était déjà programmée. Le budget pour l’organisation des JOP 2024 s’élève à 6,6 milliards d’euros contre 31 milliards pour les Jeux de Pékin en 2008. L’un des enjeux principaux de ces JOP 2024 est d’assurer l’héritage des constructions et des rénovations pour la population. Environ 95% des sites de compétition existent déjà et seuls trois sites seront construits par la SOLIDEO (Société de livraison des ouvrages olympiques). Une démarche qui s’inscrit dans une volonté de « participer à la performance sociale des Jeux », explique Roxana Maracineanu, ministre des Sports.

Par HUGO CHAMPION

Une démarche de co-construction : un schéma innovant

L’organisation des JOP permet l’accélération de projets d’envergure tel que le Grand Paris mais également la création de nouveaux équipements sportifs. Le schéma adopté par les organisateurs s’intègre dans cette démarche de co-construction des futurs sites sportifs afin de répondre aux différents enjeux que posent les JOP 2024. « La grosse partie de notre travail consiste à s’appuyer sur l’existant, ou comment créer des synergies entre les acteurs publics afin d’aller tous dans la même direction, car les politiques publiques sont sur ces chantiers, l’éducation, la lutte contre la sédentarité, le changement de regard sur le handicap… », souligne, Marie Barsacq, directrice « impact et héritage » au sein du comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 (COJO). « Cette notion de « co-construction » entre le CIO, le COJO et les parties prenantes sera au cœur de notre programme, qui est un modèle très différent d’organisation des Jeux par rapport à ce qui se faisait avant », confirme Christophe Dubi, directeur exécutif du CIO pour les Jeux Olympiques. Cette démarche s’intègre dans le cadre du plan d’accompagnement des Jeux olympiques et paralympiques signé en juin 2016. Cette convention de coopération entre la Ville de Paris, le Département de la Seine-Saint-Denis et ses 4 Établissements territoriaux (Plaine Commune, Est Ensemble, Paris Terres d’Envol, Grand Paris Grand Est) comprend « 38 mesures métropolitaines réparties en 16 actions qui ont vocation à accélérer et amplifier des politiques publiques territoriales ». L’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Île-de-France (IAUIRDS) et l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) se sont également engagés dans l’organisation des JOP, en identifiant notamment le site du futur village olympique.

C’est dans cette volonté d’associer les différents acteurs des JOP 2024 que la plateforme Impact 2024 a vu le jour. Associant la Région Ile de France, la Métropole du Grand Paris, la Ville de Paris, le Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, les Etablissements territoriaux et des représentants des membres fondateurs de Paris 2024 et notamment de l’Etat, « Impact 2024 sera une plateforme ouverte d’information, d’échanges et d’accompagnement pour réaliser ensemble des Jeux solidaires avec les territoires et tous les acteurs de l’économie sociale, de l’insertion et de l’entrepreneuriat des quartiers », résume Eric Pliez, Président des Canaux, association qui soutient les acteurs des économies solidaires et innovantes.

La rénovation et la création de nouveaux sites : un héritage pluriel

« Paris 2024 doit laisser un héritage. L’enjeu principal est de développer la place du sport dans le pays. A peu près un français sur deux aujourd’hui ne fait pas du tout de sport », rappelle Tony Estanguet. Pour que ce souhait soit réalisé, les organisateurs misent sur la rénovation et la construction d’établissements sportifs et sur la création de sites d’entraînement, notamment en Seine-Saint-Denis, département classé 103e sur 105 parmi tous les départements et territoires français en matière d’équipements sportifs : 16,2 équipements pour 10.000 habitants, contre 49,6 pour la France entière. La construction majeure pour le département est le Centre aquatique, situé sur le site de la Plaine Saulnier en face du stade de France. L’établissement sportif, qui accueillera plusieurs compétitions, comprendra deux équipements dont l’un sera pérenne (un bassin de 50 x 25 mètres avec 10 lignes d’eau pour la natation et un bassin de plongeon de 26 x 25 mètres). D’autres projets vont également assurer l’héritage des jeux pour les territoires franciliens tels que la transformation du parc des sports de Marville et de son offre sportive accessible à tous, ou encore la requalification et la mise en accessibilité complète du parc sportif du Bourget. Dans ce contexte, les JOP 2024 représentent une opportunité de combler les manques d’infrastructures et d’équipements sportifs. Ces travaux permettent dans le même temps de favoriser la pratique du sport, notamment la natation, dans un territoire où près d’un enfant sur deux ne sait pas nager. Au-delà de cet héritage matériel, le gouvernement entend profiter des jeux pour « inverser la tendance en encourageant sur tous les territoires la pratique du sport à l’école, dans les clubs, dans les entreprises », rappelle le Premier ministre Edouard Philippe.

Une opportunité pour l’innovation

Les Jeux Olympiques représentent une occasion pour les établissements sportifs existants d’accroître leur notoriété et de monter en gamme. Les JOP vont permettre d’intégrer les innovations de demain dans ces établissements afin de « booster l’expérience émotionnelle des spectateurs », explique Jean-Michel Fourgous, président (LR) de l’agglomération de Saint-Quentin en Yvelines (SQY). L’agglomération accueillera en 2024 plusieurs épreuves olympiques, notamment au sein du Vélodrome national. Le site va pouvoir expérimenter l’utilisation de la 5G pour « favoriser l’appropriation par l’ensemble des acteurs des possibilités offertes par cette bande de fréquences, et d’identifier les nouveaux usages », explique l’Arcep, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse. Et d’ajouter : « Saint-Quentin-en-Yvelines souhaite ainsi créer une plateforme ouverte d’expérimentation 5G pour son Vélodrome national afin de répondre aux enjeux de ce futur site olympique ». Les usages du nouveau réseau ne sont pas encore établis, mais ils permettront sans doute d’améliorer la gestion des flux en proposant notamment de nouveaux moyens de transport comme les bus électriques autonomes et d’assurer une sécurité aussi transparente qu’efficace.

Enfin, la transformation numérique des établissements sportifs existants s’accélérera et bénéficiera aux sportifs de haut niveau. Au-delà du bâti, les JOP embarquent toute une vague d’innovations technologiques notamment en termes de textiles intelligents, de big data, d’IA et de réalité augmentée, qui seront susceptibles d’améliorer les performances des sportifs et la détection de jeunes talents par les fédérations sportives. C’est dans ce cadre qu’onze grandes écoles et le CNRS ont décidé de s’unir pour mettre les sciences au service des champions au sein du programme Sciences 2024, qui ambitionne de lancer 500 projets étudiants ou de recherche dans toutes les disciplines olympiques et paralympiques. « La recherche scientifique a parfois donné l’impression qu’elle prenait les sportifs pour des cobayes. Là, nous allons avoir des réponses à des besoins concrets, utiles pour la performance », explique Claude Onesta, ancien entraîneur de handball des Bleus.

L’engouement du monde scientifique et de la recherche dans l’optimisation des performances de nos champions nous mènera-t-il aux 80 médailles souhaitées par l’ancienne ministre des Sports et escrimeuse française, Laure Flessel ? Rendez-vous en 2024 !