Vers un leadership français éthique

Rendre les territoires plus attractifs, plus sûrs, plus connectés, plus intelligents et plus inclusifs est un véritable challenge. Le numérique et les nouvelles technologies représentent de belles opportunités pour relever ce défi, mais ils constituent aussi des risques nouveaux à anticiper. L’émergence des territoires de confiance doit pouvoir s’appuyer sur une volonté et une démarche communes associant l’ensemble des acteurs concernés : l’Etat, les collectivités, les industriels et les citoyens. C’est dans cette dynamique que le GICAT*, acteur clé du Comité Stratégique de Filière (CSF) s’implique fortement sur ce projet stratégique des territoires de confiance.

Rencontre avec Marc Darmon, Président du CSF et du GICAT, directeur général adjoint de Thales.

Propos recueillis par Mélanie Bénard-Crozat

Sécurité et attractivité des territoires

Les territoires connaissent des mutations profondes induites par de nouvelles approches conceptuelles (smart city, résilience) et par la transformation numérique. Une économie nouvelle se développe rapidement autour des données et des nouveaux usages. « A une demande de services plus globaux s’ajoutent des enjeux de compétitivité et de souveraineté. » témoigne Marc Darmon. Dans ce contexte, la sécurité des villes et des territoires intelligents, s’inscrit comme un élément essentiel à maîtriser pour garantir la tranquillité, la résilience et l’attractivité des territoires. Une approche qui se pense collectivement dans un schéma de co-construction associant aux industriels de la sécurité, l’Etat, les collectivités et les opérateurs du territoire. « C’est une vision partagée de la ville, des territoires intelligents, et sécurisés, que nous portons dans nos travaux ; une vision multi-sectorielle et multi-acteurs incluant les acteurs publics et privés, ainsi que les citoyens. » témoigne le président du GICAT.

Structuration et coopération

La signature en janvier 2020 du contrat stratégique de filière « Industries et sécurité », entre l’Etat et le Comité stratégique de filière (CSF) représente une opportunité unique de rassembler et renforcer les différents acteurs de l’écosystème (industrie, Etat, utilisateurs), qui ont exprimé un besoin de structuration et de coopération public-privé plus étroite et ce sur 5 axes majeurs, parmi lesquels figurent les territoires de confiance. Cette notion de territoires de confiance se comprend comme les moyens déployés pour assurer la sécurité de la ville intelligente (smart city), mais aussi des territoires intelligents, jusqu’aux aires portuaires et maritimes, y compris l’outremer. « Cet axe des territoires de confiance progresse bien. Il reste cependant moins visible que les autres qui connaissent un dynamisme tout aussi important, à savoir notamment la sécurité des Jeux Olympiques, le Cloud de confiance ou encore la cybersécurité. Des domaines qui innervent par ailleurs la thématique des territoires de confiance dont les travaux s’intensifient ces derniers mois grâce à la mobilisation des élus et des industriels. » ajoute Marc Darmon.

Si ce sujet, aujourd’hui clé, fédère tout le périmètre de la filière, il requiert le concours de tous les acteurs de la cybersécurité, de l’identité numérique ou encore des spécialistes de la biométrie, des systèmes d’hypervision, de drônes, de la sécurité physique ou électronique, etc. puisqu’il est question de sécuriser toute une ville, bâtie entre autres sur les technologies du numérique. Un périmètre aussi large représente alors un marché potentiel très important. Les technologies de sécurité évoluent très rapidement et l’objectif est de développer des solutions globales, flexibles et innovantes qui exploitent ce fort potentiel et qui hisseront l’industrie française au rang de leader mondial du domaine d’ici 2025. « La France a pour ambition, à l’horizon 2025, de devenir leader mondial des territoires de confiance, avec l’éthique au coeur de son action, pour les collectivités de toutes tailles, jusqu’au niveau de la commune », confirme Marc Darmon et de poursuivre « L’association du numérique et de l’humain dans les solutions proposées apparaît comme un élément de différenciation à cultiver. »


Des plateformes de services agiles

Ce leadership français devrait émerger au travers de solutions globales pour les collectivités et les sites s’appuyant sur le développement d’architectures et de modèles de plateforme de services de confiance en mode agile, à destination des collectivités de toutes tailles, ainsi que le déploiement de nouveaux usages adossés à des technologies de rupture.

Pour répondre aux besoins des collectivités en recherche de services numériques de confiance dans le cadre d’une démarche « Smart & Safe » et d’outils et services évolutifs, adaptés à l’architecture de la ville et du territoire de demain et de leurs citoyens (communication, mobilité, IA, IoT, doubles numériques), « nous visons le développement d’une approche globale, standardisée et interopérable, sur un ou plusieurs territoires représentatifs. Nous avons d’ores et déjà progressé sur les concepts techniques, d’organisation et d’emploi avec les nombreuses collectivités impliquées dans les travaux. C’est ainsi une safe city pragmatique que nous avons voulu dessiner, qui permette à chaque citoyen, quel que soit son lieu de vie, d’avoir accès à un environnement sûr, inclusif et agréable à vivre. »

Gouvernance des données et éthique

Permettant la maîtrise de leurs données et des services, et assurant ainsi « security & privacy by design » aux collectivités, « ces plateformes de confiance faciles d’utilisation, centralisées et mutualisées, permettront d’offrir des capacités multi-services et multi-utilisateurs intégrant la gouvernance des données. » confirme Marc Darmon.

De nombreuses collectivités ont déjà mis en place ou prévoient de mettre en place des programmes d’innovation et d’expérimentation autour de nouveaux usages permis, entre autres, par la mobilité, la connectivité, l’IA, l’internet des objets / 5G, les applications pour les citoyens. laissant ainsi entrevoir l’émergence des premiers pilotes début 2022. « Nous espérons à terme déployer une centaine de plateformes sur l’ensemble du territoire national. » souligne Marc Darmon et d’ajouter « Le projet vise l’exemplarité en matière de traitement des données personnelles. Cela se matérialisera notamment par une Charte éthique liant l’Industrie, l’État et les utilisateurs des technologies de sécurité qui devrait être présentée en 2022. »

La crise sanitaire a eu le mérite de mettre en exergue l’importance de l’intelligence collective et de la coopération. « Après la crise aiguë de la COVID que nous avons vécue, je mesure à quel point la sécurité des territoires, des grands évènements à venir (La coupe du monde de rugby en 2023 puis Jeux Olympiques et paralympiques en 2024) et des citoyens reste un enjeu majeur, mobilisateur et fédérateur pour le GICAT et ses adhérents. Ce sera aussi une formidable vitrine pour valoriser tout le savoir-faire de notre industrie et contribuer ainsi au rayonnement international de notre pays. » conclut Marc Darmon.

* GICAT : Groupement des industries de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres