Au cœur des Unités d’Instruction et d’Intervention de la Sécurité Civile

« Servir pour sauver », devise Formations Militaires de la Sécurité Civile (FORMISC), résume l’action des 1 200 hommes et femmes engagés chaque jour au sein des trois Unités d’Instruction et d’Intervention de la Sécurité Civile (UIISC). Maillons essentiels de la sécurité civile, les sapeurs-sauveteurs des FORMISC sont amenés à agir dans l’urgence, à l’échelle planétaire, et, plus que jamais, à faire face à une multiplication des crises…

Par Camille Léveillé

Des unités d’intervention d’urgence

« Les UIISC sont l’« échelon national d’intervention d’urgence«  de la sécurité civile : elles doivent être en mesure d’intervenir en permanence quels que soient le lieu et le type de catastrophe. Leur contrat opérationnel implique de déployer partout en France et dans le monde entier jusqu’à 262 sapeurs-sauveteurs en moins de 3 heures (près de 25% de l’effectif opérationnel des FORMISC et jusqu’à 600 en moins de 72 heures pour une durée allant d’une semaine à un mois sans relève » explique le Préfet Alain Thirion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises. Et d’ajouter : « Leur autonomie logistique est permise par le fonctionnement régimentaire des UIISC qui intègre tous les soutiens en matière de ravitaillement, mécanique et sanitaire dans les détachements. Par ailleurs, leurs équipements et matériels de secours sont aérotransportables et déjà majoritairement colisés ».

Les Kodaly, surnom donné aux sapeurs-sauveteurs de l’UIISC1, sont mobilisés face aux risques naturels, feux de forêts, cyclones, inondations ou sauvetages déblaiement. Egalement formés aux risques technologiques, avec la menace NRBC en première ligne, mais aussi la reconnaissance et identification du risque ou encore la dépollution maritime et fluviale, leurs prérogatives ne cessent de croître. En décembre 2020, l’unité en exercice à Vernon, s’est entraînée à réaliser des prélèvements et des analyses de fumée grâce à un laboratoire mobile appelé véhicule de détection, d’identification et de prélèvement (VDIP). Cinq ans plus tôt, ils avaient été appelés en renfort par les sapeurs-pompiers de la Vienne pour identifier la substance présente dans une fiole cassée, retrouvée dans une cave d’une habitation à Châtellerault. Grâce à leur expertise, les sapeurs-sauveteurs avaient détecté la présence d’un lacrymogène extrêmement dangereux, le bromoacétate d’éthyle.

L’UIISC intervient également auprès de la population après une catastrophe naturelle notamment pour le traitement de l’eau et le déploiement de postes médicaux projetables.

Déploiement à l’international

L’une des principales caractéristiques des UIISC reste leur capacité à être déployées rapidement et en urgence à l’international lors d’une catastrophe. Le 3 septembre dernier, un détachement de l’UIISC1 a été projeté au Pakistan, alors que des pluies extrêmes, entraînant inondations et crues, s’abattaient sur le pays. Les Kodaly ont ainsi pu former 50 Pakistanais issus d’un régiment de génie local dans le sud de l’Etat. Une équipe médicale composée également d’un bataillon des marins pompiers de Marseille et de médecins et infirmières de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris était présente.

Dans un contexte de guerre en Ukraine, les UIISCont une fois encore été mobilisées. Un convoi composé de 52 sapeurs-sauveteurs issus des 3 UIISC et de l’ESOL Nord a acheminé, en mai 2022, le troisième convoi de solidarité en faveur de l’Ukraine. L’objectif : remettre à leurs homologues ukrainiens 13 véhicules de secours et 115 tonnes de matériels de secours transmis sur le hub logistique de Suceava en Roumanie. En mars, le Colonel Nicot, chef de corps de l’UIISC1 partait pour la première intervention similaire. « Avec 117 autres militaires et sapeurs-pompiers, j’ai participé au convoyage de matériels et de véhicules de secours au profit des sapeurs-pompiers ukrainiens. Nous avons traversé toute l’Europe jusqu’à la frontière pour leur fournir les équipements en sachant que dès le lendemain, ils serviraient à sauver des gens dans l’est du pays. Malgré l’expérience, ces missions génèrent toujours une forte émotion dans les équipes. » témoigne-t-il. Une quatrième intervention, au profit des sapeurs-pompiers ukrainiens a eu lieu fin septembre avec le concours de l’UIISC7. « Tous ces convois de solidarité sont organisés par le centre de crise et de soutien du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, et le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, dans le cadre du mécanisme de protection civile de l’Union européenne. Ils témoignent de la solidarité de la France envers le peuple ukrainien » explique le Colonel Nicot.

L’importance de la coopération

S’inscrivant dans un cadre international, les UIISC coopèrent de façon bilatérale et avec des institutions internationales notamment en matière de formation. Cela vaut également lors d’exercices de préparation opérationnelle. « Nous accueillons régulièrement au sein de l’unité des délégations étrangères qui viennent visiter et potentiellement s’inspirer de notre structure pour en recréer une équivalente au sein de leur pays en s’appuyant sur la grande expérience du modèle français de sécurité civile » explique le Colonel Nicot, et de poursuivre : « En termes de partenariat, nous sommes jumelés avec le 4e bataillon d’intervention d’urgence des forces de secours militaires espagnols. Nous avons des échanges réguliers, notamment sur les entraînements concernant le sauvetage déblaiement, les feux de forêts et le sauvetage en mer. Concernant nos actions de formation à l’étranger, nous coopérons avec de nombreux pays en particulier sur le continent africain, au Maghreb et en Afrique de l’Ouest en particulier, ainsi qu’en Amérique du Sud. En 2022, l’UIISC1 a mené près de 20 actions de formations à l’étranger et plus de 80 formateurs ont été déployés dans 12 pays ».

Des unités à la pointe de la technologie

A l’instar des autres forces de sécurité, les sapeurs-sauveteurs s’appuient également sur les nouvelles technologies pour une action plus rapide et mieux coordonnée. « Nous opérons une veille technologique permanente destinée à prendre en compte les nouveautés du marché. Par exemple, nous intégrons désormais des drones terrestres et aériens» souligne le Chef de corps de l’UIISC1.

« L’évolution des technologies facilitera la gestion et la coordination des moyens sur le terrain. C’est un véritable enjeu de développement pour l’avenir. Il est nécessaire désormais de renforcer les capacités de gestion et d’appui au niveau zonal pour être ce maillon indispensable entre le terrain et le niveau décisionnel » témoigne le Préfet Thirion. « Ce chantier est encore à poursuivre » selon lui. Le développement de ces nouveaux moyens de communication, ayant pour vocation d’assurer un très haut débit, présente une aubaine pour les UIISC qui doivent régulièrement se rendre en zone reculée où les communications sont difficiles. « Nous nous devons d’être interopérables avec l’ensemble des forces de secours et effectuons de nombreux exercices de préparation opérationnelle conjoints. Ainsi, au même titre que les autres forces de sécurité et de secours, nous serons équipés du Réseau Radio du Futur » souligne le Colonel Nicot.

Au-delà des communications, « certaines technologies de pointe sont déjà mises en œuvre sur le terrain. C’est le cas des mini-drones tactiques utilisés en appui des unités qui pourraient être complétés dans le futur par l’emploi de drones moyenne élongation dotés d’intelligence artificielle. Les matériels et véhicules de détection, d’analyse et d’identification NRBC des UIISC constituent également de véritables concentrés de technologie de pointe. L’acquisition d’outils de numérisation de la zone d’intervention (cartographie et position des engins) et des postes de commandement, de réseaux de transmission du futur interopérables et de capacités de transmission des données, permettront à nos forces d’agir encore plus rapidement lors de catastrophes de toute nature » note le Préfet Thirion.

Faire face à la multiplicationdes catastrophes

Dans un contexte où les crises aux conséquences dévastatrices vont se multiplier, les Unités d’Instructions et d’Intervention de la Sécurité Civile n’auront d’autres choix que l’adaptation et la résilience.Les FORMISC, dont font partie les sapeurs-sauveteurs de l’UIISC1 « font preuve d’une polyvalence et d’un niveau de technicité de plus en plus important » souligne Alain Thirion et de poursuivre : « La multiplication des catastrophes engendrera mécaniquement une implication croissante des UIISC en qualité de premier levier étatique en cas de crise à l’international […]. En réponse, la formation et l’entraînement de nos sapeurs-sauveteurs doivent être durcis en insistant sur leur réalisme et leur intensité avec des phases de contrôle longues, exigeantes et dans des conditions rustiques. Les savoir-faire de base entretenus dans tous les domaines permettent de s’adapter rapidement aux nouvelles crises. Ainsi, nous avons su réagir efficacement lors d’épidémies inconnues comme Ebola ou la Covid 19 pour rapatrier ou prendre en compte des victimes ».

Pour faire face à cette multiplication des catastrophes, « le renforcement et la densification des capacités des UIISC est aussi une solution concrète et envisageable à court terme » conclut le Directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises.