L’expertise française en matière d’équipements de défense et de sécurité continue d’étendre son influence. En matière d’armement, les dernières estimations du SIPRI montrent que la France pourrait devenir second exportateur mondial dépassant la Russie dont les échanges commerciaux ont connu une diminution brutale. Sur le marché de la sécurité, de nouvelles priorités s’affirment. Business France et Team France Export ont établi les pays prioritaires pour 2023. Retour sur les grandes opportunités internationales pour les acteurs français de la sécurité.
Un marché africain en expansion
L’Algérie constitue le marché africain le plus convoité alors qu’une offre locale se développe en partenariat avec de nombreux groupes internationaux pour répondre à une forte demande dans le domaine de la sécurité civile, des nouvelles technologies numériques et de surveillance par drones ou encore de la sécurité industrielle portée par les appels d’offres réguliers de la compagnie pétrolière publique Sonatrach. 25 millions d’euros ont été investis dans les importations de véhicules anti-incendies. Italie, Allemagne et Chine se positionnent comme de sérieux concurrents.
Autre pays nord-africain à suivre : l’Egypte. L’accord de libre-échange entre l’Egypte et l’Union européenne en fait un partenaire de confiance de longue date, où les grands groupes français comme Naval Group ou encore les PME à l’image d’Arquus sont déjà bien implantés. Avec le déploiement de nouvelles infrastructures à venir, dont 6 parcs technologiques, le domaine de la protection des données et de la cybersécurité représentent des opportunités pour accompagner le pays dans sa numérisation.
Enfin, la Côte d’Ivoire, dotée d’une économie stable, s’affirme comme un marché prioritaire d’autant que le pays souhaite investir massivement. Le budget attribué à la sécurité dépasse celui de la défense avec pour préoccupation majeure la surveillance maritime contre la piraterie mais aussi la sécurisation des frontières pour affronter le terrorisme sahélien. C’est d’ailleurs l’un des dossiers qui avait permis de réaffirmer le rapprochement entre Paris et Abidjan en 2017 et qui, depuis, laisse place à un solide partenariat stratégique favorable aux échanges sur les dossiers sécuritaires.
Le Moyen-Orient, terres d’opportunités
En 2022, le Qatar a battu des records d’investissements dans l’armement, incarnant le symbole d’un Moyen-Orient en mutation. L’Arabie Saoudite reste un marché privilégié alors que le pays doit relever de nombreux défis entre le conflit yéménite toujours en cours, les menaces terroristes mais aussi le challenge de l’urbanisation intensive du pays. Au travers du plan Vision 2030, le Royaume souhaite miser sur une production nationale sur le marché de la sécurité tout en continuant de renforcer ses partenariats internationaux. Bien que l’industrie française soit encore reléguée derrière les Etats-Unis qui dominent le marché, l’état-major local ne cache pas une certaine francophilie qui offre de belles possibilités notamment dans les domaines de la sécurisation des sites sensibles et de la formation des personnels.
Avec Abu Dhabi, Dubaï et Sharjah dans le top 10 des villes les plus sûres du monde, les Emirats arabes unis tiennent à s’affirmer comme un modèle de sécurité. L’investissement de 10 milliards de dollars prévus pour les 10 prochaines années ainsi que les barrières douanières attractives donnent l’occasion aux industries françaises de s’y installer sur certains segments prioritaires comme les caméras infrarouges et thermiques ou la lutte contre les incendies. Pour cela, les acteurs français peuvent compter sur le partenariat stratégique noué entre Paris et Abu Dhabi depuis 2009 ainsi que l’implantation de groupes comme Thales qui contribue à la définition d’une stratégie de cybersécurité de la ville.
Exporter vers les partenaires européens
Malgré quelques dissensions sur des dossiers stratégiques, la relation franco-allemande reste toujours marquée par un volontarisme affiché sur des programmes porteurs communs à l’image des projets MGCS et SCAF qui, en dépit de leur retard, inscrivent la relation entre industries dans le long terme. Avec un riche tissu industriel spécialisé dans la sécurité et la défense, la concurrence est rude. Pourtant des opportunités existent bien outre-Rhin où les épisodes de sécheresse et les inondations de 2021 ont renforcé la demande en matière de structures de sécurité civile pour pallier l’insuffisance des systèmes d’alarme. Outre l’implantation de groupes et entreprises françaises de toutes tailles, c’est bien le contexte de la guerre en Ukraine qui donne les signes les plus favorables pour les exportations avec un bond inédit des dépenses dans les secteurs de la défense et la sécurité.
L’Autriche fournit également des investissements majeurs. En 2021, 215 millions d’euros supplémentaires ont été dédiés à la sécurité des personnes comparés à l’année précédente. Le chancelier Karl Nehammer annonçait également vouloir investir 30 millions dans la cyberdéfense et la modernisation de la police pour faire face à la criminalité organisée.
Réévaluation de moyens en Asie
Avec une densité de population sans pareil ainsi qu’une exposition régulière aux catastrophes naturelles, le continent asiatique et les archipels du Sud-Est tentent de se prémunir pour faire face à des défis d’ampleur inédite. L’Inde, attribuant 67,5 milliards d’euros à la défense et 22,5 milliards à son ministère de l’Intérieur, s’affirme comme un marché prioritaire pour les exportations françaises. La coopération franco-indienne en matière de sécurité rapprochée mais également de lutte anti-terroriste depuis les attentats de Bombay en 2008 ont permis un rapprochement sur les dossiers de sécurité. Les opportunités sont nombreuses en matière de gestion de crise NRBC tout comme dans l’accompagnement de la sécurité des 109 smart cities qui doivent voir le jour en Inde.
Après le renforcement du partenariat stratégique en 2021 entre la France et l’Indonésie, de nombreux accords de coopération commerciale ont été annoncés l’an dernier par Dassault, Naval Group, Nexter et Thales. Les perspectives semblent ouvertes pour une insertion sur le marché indonésien, désireux d’attirer des prestataires internationaux comme le montrait encore le salon INDO DEFENCE 2022. La modernisation de l’équipement de sécurité des forces de l’ordre, la cybersécurité ou encore les infrastructures nécessaires pour la mise sur pieds de la future capitale Nusantra sont autant de dossiers favorables aux exportations françaises.
L’Amérique latine face à ses défis sécuritaires
L’ancien président Ivan Duque l’avait annoncé au travers de son plan national amorcé en 2018, la sécurité en Colombie est une priorité pour faire face au conflit armé interne tout comme les narco-trafics qu’elle peine à réfréner. 2023 ne déroge pas à la règle même après l’élection du président Petro qui a revu les priorités à la baisse. Si les Etats-Unis restent leader sur ce marché, la riche demande en matière de gestion de crise et de sécurité privée, notamment pour assurer l’escorte et le transport des objets de valeurs, permettent d’y envisager des partenariats durables d’autant plus dans un contexte toujours tendu et alors que l’Etat colombien s’appuie sur des organismes privés d’élites pour épauler ses forces de l’ordre dans son combat contre l’ELN.
Le Mexique est également un marché de choix, grâce notamment aux accords de libre-échange signés avec l’Union européenne. Outre les concurrences israélienne et asiatique, les entreprises nord-américaines y restent largement avantagées grâce à l’initiative Mérida, un programme de coopération dans le domaine de la sécurité. Une véritable culture de la prévention voit le jour sur le sol mexicain et certains segments de marchés restent à exploiter. La récente Garde Nationale, déployée depuis 2019 dans le cadre de la lutte contre le narco-trafic, nécessite toujours des équipements de base, de systèmes de communications et présente encore des besoins conséquents en matière d’armement.
Le guide « Où exporter dans le secteur de la sécurité en 2023 » réalisé par les équipes de Business France met en avant une vingtaine de pays considérés comme prioritaires. Il est accessible via le lien suivant : https://www2.businessfrance.fr/Ou-Exporter-en-2023-S-et-D-magazine