Le futur réseau de communications des forces de sécurité fait du bruit

Dans un monde ultra connecté où la diffusion de l’information en temps réel est une évidence du quotidien, l’heure de repenser les systèmes de communications des forces de sécurité et de Défense est venue. Le but : répondre aux nouvelles exigences de notre société et donner les moyens aux acteurs opérationnels d’y parvenir.
Plusieurs questions se posent alors. Celles de l’interopérabilité et de mobilité dans un monde décloisonné, celle du niveau de sécurité de diffusion des informations souvent sensibles ou confidentielles, celle du débit à l’heure où la 4G fait son entrée sur le marché, celles d’un réseau privé ou public, et enfin celle des budgets, toujours plus maigres… Mais qu’en est-il des besoins opérationnels des primo-intervenants ? Question essentielle, pour ne pas dire vitale.
Alors que les analyses concernant les besoins opérationnels et les exigences en constante évolution à appréhender convergent dans le même sens, la définition du réseau suscite elle bien des dissonances au sein des parties prenantes dans ce dossier.
Est-ce un problème du manque de dynamique commune des institutionnels, des politiques et des industriels, un manque d’objectivité dans les réponses avancées par les uns et les autres, dans les arguments apportés ou existe-t-il plusieurs solutions possibles et toutes efficaces ?

In a highly connected world where the spread of information in real time is a daily fact of life, it is time to rethink the communication systems used by security and defence forces. The aim is to respond to new requirements in our society and give the players in the field the means to meet them.

    • De l’avenir des réseaux de communication nationaux des primo-intervenants de la sécurité

      Au début des années 1980, une rupture technologique a été opérée en France avec le choix concerté Délégation générale pour l’armement – Gendarmerie nationale du numérique pour le réseau de radiocommunication Rubis. Choix évident aujourd’hui, le numérique ayant relégué l’analogique au rang des technologies antédiluviennes. Choix osé à l’époque.Ce dernier a permis le développement et le succès de la technologie Tetrapol, le déploiement de deux réseaux nationaux Rubis pour la gendarmerie nationale et Acropol pour la Police nationale. Un succès industriel amplifié à l’international.
      Si l’on peut se féliciter d’avoir été pionniers en matière technologique, force est de constater qu’il n’en est pas de même pour les choix d’architecture des réseaux des primo-intervenants français de la sécurité (polices, gendarmerie, douanes, pénitentiaire, …). Ces réseaux sont, vingt ans après, disjoints en termes d’architecture et d’exploitation et hétérogènes technologiquement, alors que bon nombre de pays européens ou étrangers ont réussi à construire des réseaux partagés pour leurs forces de sécurité.Témoignage de Bernard REFALO, actuel délégué général adjoint du GICAT en charge de la branche sécurité, a été directeur de programme RUBIS et manager des opérations de télécommunication de la gendarmerie au sein de la DGA de 1995 à 2003.Comment en sommes-nous arrivés là ?
      L’individualisme des Français est reconnu. Il a joué à plein en la matière. Peu importe les arguments avancés (économie financière, rationalisation technique, optimisation des ressources rares que sont les points hauts ou les fréquences, interopérabilité native, etc.), peu importe les rapports dénonçant cloisonnements et dysfonctionnements dans les communications en cas de crise. Ce qui a primé in fine, ce sont les crispations identitaires, le conservatisme et très certainement aussi un manque de courage général pour oser et décider. J’en suis témoin pour avoir procédé aux premières études et propositions de réseaux multiflottes en 2000 qui n’ont pu déboucher. Mais peut-être avons-nous aussi failli en ne sensibilisant pas assez les décideurs sur les enjeux stratégiques de ce dossier au plan financier, opérationnel, technique et services.

      Et maintenant ?
      Certes, les réseaux actuels fonctionnent et donnent satisfaction. Certes, il existe des solutions de passerelles palliant leur cloisonnement. Certes, il y a bien eu des avancées en matière de partage de réseaux qu’il faut saluer, notamment avec le réseau INPT (Infrastructure Nationale Partageable des Transmissions), mais au prix de beaucoup d’énergie, de frustrations, d’efforts financiers et avec des élongations calendaires bien trop importantes. Dans le contexte actuel marqué par la réduction des budgets publics d’investissement, la rapidité des évolutions technologiques et normatives, les demandes de nouveaux services de la part des utilisateurs opérationnels, un niveau d’exigence de services accru de nos concitoyens, ce serait non plus une erreur mais une faute de ne pas se pencher en temps et en heure sur l’étude et la définition des futurs réseaux.

      Se donner les moyens
      Se donner les moyens de transcender les clivages organisationnels, les crispations identitaires, la concurrence industrielle pour obtenir un dossier d’orientation. Il semblerait qu’il y ait consensus aujourd’hui sur la notion de réseau multiflottes ou partagé par les primo-intervenants de la sécurité. C’est une évidence, encore faut-il la rappeler car il y a loin de la coupe aux lèvres entre ce qui existe aujourd’hui et la cible finale. Le débat va donc porter sur les limites fixées à l’exercice ; type de flottes, nature des missions, nombre, coûts, etc.
      Le sujet de l’opérateur du réseau est, lui, plus délicat. Doit-il encore être public ? Privé à statut particulier ? Mais a-t-on vraiment les moyens d’envisager une acquisition patrimoniale pour un nouveau réseau ? J’en doute. Il a fallu 15 ans pour concevoir et déployer Rubis du fait du sacro-saint principe de l’annuité budgétaire. Ce fut long et contraignant. Est-il nécessaire de faire la comparaison avec le déploiement des réseaux privés GSM ?

      Au plan technologique, plusieurs solutions concurrentes rivalisent. Sont éligibles entre autres les technologies Tetrapol, Tetra et LTE. Lorsque l’on sait qu’elles sont défendues par des groupes industriels différents et que l’on connaît les enjeux industriels nationaux et internationaux, on peut penser que ce ne sera pas un facteur de choix simplificateur…
      Je pourrais rajouter d’autres contraintes, comme la prise en compte de l’existant qu’il convient de préserver au mieux. Pour instaurer, coordonner et dépassionner ces débats, il faudrait dans un premier temps un “choc organisationnel”. Il y a aujourd’hui trop de courants de pensée, d’acteurs et autant de partis pris qui troublent l’avancement de ce dossier.

      Il est encore temps
      Les choix qui seront opérés pour les futurs réseaux seront engageants pour des décennies. Les enjeux sont importants pour ne pas dire énormes. Les idées ne manquent pas, les solutions non plus, elles ont même tendance à foisonner.
      Les réseaux actuels peuvent encore fonctionner quelques années. Il est donc encore temps de prendre les mesures qui s’imposent, notamment sur la nécessité de créer les bonnes conditions à la naissance de ce nouveau projet puis à sa bonne gestion, avant même de mettre l’accent sur les différentes solutions techniques. Il s’agit d’abord d’expliquer, de rassembler en tenant compte des échecs passés, de créer une dynamique commune avec les décideurs politiques, institutionnels et industriels. Dans ce cadre, le GICAT se tient prêt à apporter son concours pour aider à éclairer le débat en animant de manière objective et collective des groupes de travail communs industrie-administration.

      France was a pioneer in digital radio communication technology in the 1990s, with the development of Tetrapol and the creation of two national networks, Rubis and Acropol, for its national gendarmerie and police forces.

      The current challenge is to define and design the future national communications network of primary security stakeholders. The choice of its architecture, performance and technologies make this a complex project. It brings considerable operational and industrial challenges that require particular attention.

      It is highly preferable that this future network should be shared by all security forces, and even other users, because of reduced state budgets, the need for interoperability, and scarce high points and frequencies. This network concept requires everyone to be a member and take a joint approach. Concrete European and international references show that France can attain this objective. GICAT is ready to lend its support to make it a reality.

    • Les technologies de 4e génération de la téléphonie mobile comme solution d’avenir pour l’évolution des réseaux PMR

      Les crises majeures, auxquelles les services du ministère de l’Intérieur ont été confrontés ces dernières années, confortent la pertinence des choix technologiques retenus, tout particulièrement dans le cadre des systèmes de radiocommunication mobile.
      Forts de cette expérience dans la gestion de crises et des besoins nouveaux des utilisateurs, les spécifications techniques d’un futur réseau de télécommunication au profit des services de l’État sont clairement définies. Ainsi, elles se doivent d’être prospectives et innovantes afin de répondre aux attendus technico-fonctionnels, tout en recherchant à optimiser au mieux le modèle économique de la solution cible.

 

 

Explication du général Bernard Pappalardo, chef du ST(SI)2, Service des technologies et des systèmes d’information de la sécurité intérieure du ministère de l’IntérieurDes réseaux adaptés

Les récentes catastrophes naturelles (Klaus 2009, Xynthia 2010, épisodes neigeux) tout comme les catastrophes technologiques (accidents ferroviaires, aériens, industriels, incendies, etc.), voire la menace terroriste, ont conforté les services d’urgence et de sécurité publique dans leurs choix technologiques. Ces services régaliens soulignent la nécessité de préserver des systèmes de communication propriétaires ou maîtrisés, seuls garants de la résilience et de la disponibilité indispensables à la bonne exécution des missions en toutes circonstances.
À ce titre, lors des tempêtes de 2009 et 2010, les réseaux d’infrastructure des opérateurs de téléphonie mobile se sont avérés dans l’incapacité de garantir la fiabilité et la qualité des services offerts aux utilisateurs. Ceci en raison des dégradations matérielles engendrées par des conditions climatiques exceptionnelles (destruction de pylônes, dégradation des aériens, défaut d’alimentation en énergie, …), mais aussi au regard d’une saturation non maîtrisable du réseau (mouvement de panique, augmentation des appels d’urgence, concentration d’abonnés, …). En cela, seuls les réseaux de radiocommunication privés (PMR) peuvent à ce jour offrir la garantie de service et les fonctionnalités spécifiques attendues (communication de groupe, appel de détresse, mode direct, …) par les services d’urgence et de sécurité publique dans la gestion de crise.
Disposant de telles infrastructures pour couvrir l’ensemble du territoire national (RUBIS pour la Gendarmerie nationale et INPT pour la Police nationale, les pompiers, la sécurité civile et les SAMU), le ministère de l’Intérieur possède des systèmes de communication actuellement adaptés à ses besoins opérationnels. Parallèlement, pour la Gendarmerie nationale, la disponibilité d’une chaîne “SIC” pour le soutien opérationnel de proximité permet de faire face sans délais aux incidents ou dégâts matériels rencontrés grâce à une capacité d’intervention sur site renforcée et à la mise en œuvre immédiate de moyens complémentaires de circonstance.
Pour autant, même si ces choix technologiques et stratégiques satisfont aux besoins critiques de communication, la mise en adéquation des moyens matériels aux attendus opérationnels relève d’une analyse pragmatique et constante en vue d’identifier les axes d’amélioration.

Des événements riches d’enseignement
Ainsi, les grands événements récents (65e anniversaire du débarquement en 2009, le G8 et le G20 en 2011), par la mise en œuvre de systèmes d’information complémentaires, l’augmentation des ressources radio et l’optimisation de la couverture des réseaux, posent les bases d’une réflexion technique sur l’évolution des réseaux de communication ainsi que sur les nouveaux services à offrir à moyen terme aux utilisateurs.
À ce titre, les débits offerts par les réseaux de radiocommunication du ministère ne permettent pas de répondre pleinement à des besoins en transmission de données, en constante augmentation, notamment lors de crises majeures ou de grands événements. Pour autant, les demandes d’informations enrichies pour les salles de commandement comme pour les autorités d’emploi (géolocalisation, remontées vidéo, intégration de nouveaux systèmes d’information, etc.) ou l’augmentation des capteurs d’informations sur le terrain (caméras autonomes, robots démineurs, drones de surveillance, etc.) rendent nécessaire la mise en œuvre de services haut débit de circonstance.
En outre, l’interopérabilité justifiée par la diversité et l’hétérogénéité des acteurs (services de secours, services de sécurité, forces armées, opérateurs d’importance vitale, etc.) est désormais un élément-clef de la gestion des réseaux. Car, étant impliqués dans la gestion d’une crise ou d’un événement majeur, ils invitent à s’appuyer, pour l’avenir, sur des solutions technologiques standardisées et à mutualiser les infrastructures pour satisfaire aux besoins fonctionnels tout en rationalisant les coûts et en optimisant les investissements.

Un réseau d’infrastructure mobile de nouvelle génération
En réponse aux préconisations évoquées précédemment, l’emploi de relais radio embarqués à bord de plateformes aéroportées (ballon, dirigeable, drone, etc.) n’est pas une idée nouvelle. Cependant, elle demeure une solution innovante qui permet de garantir la fiabilité des services de communication en toutes circonstances, compléter la couverture radioélectrique lors de catastrophes ou offrir une capacité de communication renforcée lors de grands événements.
S’inscrivant dans un projet à financement européen, ce concept innovant d’une architecture mobile de nouvelle génération se propose de répondre aux enjeux suivants : disposer d’un système modulaire et reconfigurable, déployable rapidement en toutes circonstances ; s’appuyer sur des équipements de téléphonie mobile de nouvelle génération (4G ou LTE-A) pour satisfaire aux besoins de transmission de données haut débit ; garantir l’interopérabilité de systèmes de communication hétérogènes (téléphonie mobile, communications satellitaires, moyens radio actuels des forces de sécurité tels que TETRAPOL ou TETRA, …) ; assurer la disponibilité, la résilience et la sécurité attendues par les services d’urgence et de sécurité ; et enfin conforter la norme LTE-A comme solution d’avenir pour les réseaux de radiocommunication mobile à l’horizon 2020-2025.

Disposer d’un système modulaire et projetable
Reposant sur une combinaison opportuniste des moyens de communication aériens, terrestres et satellitaires existant afin de garantir la disponibilité du réseau, la configuration retenue pour la réalisation d’un premier prototype permet de disposer d’un système modulaire et projetable sans délais. Pour autant, la complexité de la solution se trouve tout autant dans les enjeux technologiques que dans les réponses techniques et matérielles à apporter pour répondre aux exigences de mobilité (poids, encombrement, mise en œuvre, etc.) et aux contraintes énergétiques.
L’architecture fonctionnelle du système doit permettre aux stations de base aéroportées d’établir un cœur de réseau d’opportunité tout en fédérant l’infrastructure terrestre présente sous la couverture radioélectrique. Parallèlement, le rôle de passerelles joué par les stations terrestres mobiles doit conduire à garantir l’emploi des moyens de communication à disposition des services engagés sur des catastrophes (TETRAPOL, TETRA, etc.) afin de répondre aux enjeux d’interopérabilité évoqués précédemment.

Des services haut débit
Si la mise en œuvre de liaisons satellitaires permet d’envisager la transmission d’informations enrichies vers les salles de commandement ou les autorités d’emploi en toutes circonstances, le choix d’une solution embarquée reposant sur la norme LTE-A doit permettre d’offrir des services “haut débit” similaires à ceux proposés par les opérateurs de téléphonie mobile. De plus, l’utilisation du prototype dans la réalisation de cas concrets (incendies de forêt, inondations, tremblements de terre, tempêtes, Jeux olympiques, championnats du Monde) doit permettre de mieux appréhender les capacités du LTE-A à supporter, à moyen terme, les fonctionnalités recherchées par les services d’urgence et de sécurité au regard des débits réellement offerts, de l’efficacité spectrale et de la latence.
Ainsi, parallèlement aux travaux de spécification des communications de groupes et du mode direct menés par l’instance internationale de normalisation de la téléphonie mobile (3GPP) sur le LTE-A, le ministère de l’Intérieur sera à même de mesurer le degré de maturité de cette technologie et de confirmer l’intérêt qu’il convient d’y porter, à terme, l’ensemble des services supportés actuellement par les réseaux RUBIS et INPT.

Tout autant que les démonstrations théoriques et pratiques de la mise en œuvre d’un segment aérien projetable dans un réseau d’infrastructure de télécommunication, le développement du concept proposé vise à faciliter l’adoption des technologies de 4e génération de la téléphonie mobile comme solution d’avenir pour l’évolution des réseaux PMR.
Apportant dans un premier temps les capacités haut débit attendues des utilisateurs fonctionnels, le LTE-Advanced doit permettre d’apporter dans un second temps les fonctionnalités propres aux réseaux dédiés. Ce faisant, la convergence technologique de la téléphonie mobile et de la PMR ouvre la porte à une nouvelle organisation structurelle capable de permettre à l’ensemble des acteurs de la sécurité d’œuvrer sur un réseau d’infrastructure unifié.

    • Le haut débit cherche sa fréquence !

      À l’heure où le ministère de l’Intérieur prévoit pour juillet 2013 une réforme de l’administration centrale, jugée par ailleurs « ambitieuse » place Beauvau, les servicesde communication et systèmes d’informations ne sont pas en reste.
      La note de Manuel Valls prévoit notamment la création d’une équipe dédiée placée sous l’autorité directe du secrétaire général. Chargée de la « gouvernance stratégique » dans le domaine des systèmes d’information, elle aura pour fonction l’ « arbitrage des évolutions techniques structurantes nécessaires » et la « validation du lancement des projets », dont le chantier du nouveau réseau des télécommunications des forces de sécurité pourrait bien faire partie. Un chantier destiné à améliorer le travail des forces de sécurité…À la problématique des objectifs opérationnels du nouveau réseau, tous s’accordent à dire qu’il faut offrir un réseau capable de traiter de la voix, des données images, de la vidéo ou encore d’accéder à des bases de données à distance ou à Internet. En somme, un réseau en phase avec son temps.
      Pour cela, il faut donc offrir de la bande passante supplémentaire pour les flux de données et donc du haut débit.Consortium autour du LTE

      Aujourd’hui, la norme LTE (Long-Term Evolution) est la technologie choisie par les opérateurs commerciaux pour augmenter la capacité de leurs réseaux et répondre ainsi aux nouveaux usages applicatifs, notamment à base de vidéo, très consommateurs de bande passante. « L’utilisation de plus en plus importante des systèmes d’information au sein de la sécurité et de la défense fait du LTE la technologie candidate pour répondre aux besoins opérationnels de transmission haut-débit », souligne Thales, rejoint par Guy Mans, responsable commercial Secteur public de Motorola Solutions, pour qui « la future technologie radio doit être et sera le LTE ». Le LTE fait donc l’unanimité et sert parallèlement l’implication sans faille de Thales dans le continuum sécurité/défense. En effet, le groupe précise « que l’étude de la norme LTE, technologie civile de pointe, s’inscrit parfaitement dans la politique du continuum sécurité/défense menée par le groupe. » Groupe retenu par ailleurs en mars dernier par la Direction générale de l’armement (DGA) pour conduire une étude technico-opérationnelle (ETO) portant sur l’Analyse de la norme LTE et son exploitation au sein des forces Armées (ALTEA). « Une étude qui devra permettre de mettre en évidence les capacités susceptibles d’être apportées par cette technologie lors d’opérations extérieures et sur le territoire national et ce, en collaboration avec les forces de sécurité », souligne Thales.
      Une solution LTE, appropriée au milieu de la sécurité publique et de la défense, qui devra être adaptée à un environnement où les contraintes d’utilisation et les performances à atteindre sont plus exigeantes. Aussi, cette solution devra être interopérable, une réponse essentielle à la mobilité dont ont aujourd’hui besoin les acteurs opérationnels. Cela implique notamment des outils plus faciles à transporter, à manier, autonomes et légers. Plus proches d’un smartphone que d’un PR4G donc… « Le réseau des policiers de demain et non pas du futur », précise Sébastien Sabatier, directeur Stratégie et Marketing au Service sécurité nationale C4I et PMR de Thales « doit permettre aux policiers et aux gendarmes, mais aussi aux sapeurs-pompiers ou encore aux agents des opérateurs d’intérêts vitaux, de pouvoir se connecter et échanger ensemble. Le système actuel, patrimonial, montre aujourd’hui ses limites sur ce sujet. Beaucoup d’intervenants ne sont pas connectés et connectables, engendrant les problèmes que l’on peut facilement imaginer. Aussi, le nouveau réseau doit être résilient, s’adapter aux changements, aux évolutions, il doit être un réseau crypté, étanche et non pénétrable, mais partagé », ajoute-t-il. Et Guy Mans de poursuivre, « partagé oui, indépendant des opérateurs publics oui, mais opéré ». Un opérateur qui pourrait être un consortium de plusieurs industriels, de plusieurs agences, d’opérateurs civils de confiance…
      Un réseau en somme fédérateur mais pas propriétaire qui trouverait sa place dans un environnement de standardisation avec des moyens et des technologies au goût du jour qui permettrait, on peut l’imaginer, la diffusion rapide de vidéos entre les “hommes de terrain” et le poste de commandement, la télémédecine pour les pompiers, ou encore une meilleure réactivité dans la conduite des enquêtes grâce à des accès à distance aux bases de données sécurisées…
      Le déploiement du réseau LTE est aujourd’hui acquis par les États-Unis, qui viennent d’annoncer un budget de près de 10 milliards de dollars consacré pour les 10 prochaines années à la construction de ce réseau opéré par FirstNet. Thales Communications, Inc. société 100 % américaine du groupe Thales, participe notamment au programme Public Safety Communications Research (PSCR) qui vise à promouvoir l’interopérabilité des systèmes de communication de sécurité publique à l’échelle des États-Unis. « Cet essai d’interopérabilité dans le cadre du PSCR est un jalon important pour notre solution LTE de sécurité publique en réponse aux besoins spécifiques de nos clients », a ainsi déclaré Michael Sheehan, PDG de Thales Communications. Mené en proche collaboration avec des partenaires du secteur privé et du domaine de la sécurité publique, le programme PSCR met à la disposition des fabricants, opérateurs et agences de sécurité publique un banc d’essais de démonstration permettant d’évaluer les équipements et logiciels de communication haut débit en vue du déploiement d’un futur réseau de communication dédié aux services d’urgence dans la bande passante unique des 700 MHz. Bande de fréquence aujourd’hui à l’origine des discordances dans le traitement du dossier des futurs réseaux de communication des forces de sécurité de notre pays.

      700 ou 400, les chiffres de la discorde
      Question agnostique selon Guy Mans pour qui les deux fréquences présentent respectivement des avantages et des inconvénients. Du côté de Thales, la réponse est identique « toutes les gammes sont intéressantes. Reste que la réponse à cette question ne doit pas être imposée par l’industriel mais elle se trouve dans l’écosystème », ajoute Richard Kalczuga, directeur Comptes clés chez Thales. Un écosystème qui est en train de se former autour du 700 MHz avec les États-Unis qui semblent s’orienter vers ce choix, suivis par le Canada et l’Asie Pacifique. En Europe, la Conférence européenne des administrations des postes et télécommunications (CEPT) et la Commission européenne réfléchissent à l’établissement de nouvelles normes pour les télécommunications destinées aux forces de sécurité, et notamment à l’introduction de cette nouvelle plage fréquentielle à 700 MHz. Une réflexion qui séduit d’ores et déjà les pays d’Europe du Nord. Reste l’Espagne et la France, qui s’orienteraient vers un maintien de l’utilisation de la fréquence des 400 MHz qu’elles possèdent aujourd’hui. Un positionnement à l’origine du débat que suscite ce dossier. L’Agence nationale des fréquences, qui gère l’intégralité du spectre radioélectrique, elle est alors là pour garantir la neutralité technique et coordonner les travaux préparatoires aux niveaux national et international. Elle apporte ainsi au Gouvernement son expertise technique afin qu’une décision puisse être prise dans les meilleures conditions… Une décision complexe sur un sujet où la passion n’est jamais très loin, qui exige pour autant une certaine sérénité…
      Pierre-Philippe Lidureau, directeur du programme INPT (Infrastructure nationale partageable des transmissions) au ministère de l’Intérieur, en faveur du maintien de la bande passante 400 MHz, explique que si cette fréquence (comprendre le 700 MHz) « devient la norme, une nouvelle ingénierie sera nécessaire pour l’infrastructure des télécommunications des forces de sécurité en France qui, je le rappelle, a représenté un coût de l’ordre de 1,1 milliard d’euros. » Aussi, le ministère de l’Intérieur vient de réaliser, avec l’industriel Cassidian, la démonstration opérationnelle d’un service de communication à haut débit mobile utilisant la 4G à destination des forces de sécurité sur la fréquence de 400 MHz. Une opération visant à démontrer, selon Pierre-Philippe Lidureau, aux instances internationales l’opportunité de la plage fréquentielle à 400 MHz et la faisabilité d’un réseau utilisant la technologie 4G LTE dans cette plage fréquentielle. Une démonstration qui confirme que la couverture radio de cette technologie est similaire au système actuel basé sur le standard Tetrapol permettant ainsi de conserver l’infrastructure existante et les sites en cas d’évolution, en Europe, des télécommunications des forces de sécurité vers la technologie 4G LTE. Enfin, l’opportunité de vérifier l’étanchéité des réseaux Tetrapol et 4G LTE qui peuvent, visiblement, tous deux cohabiter. Expérimentation satisfaisante, semble-t-il, mais qui divise toujours, au sein du ministère de l’Intérieur, où tous les avis ne vont pas dans le sens du maintien de la bande 400. Rien n’est donc encore fait. Guy Mans explique lui que « nous avons la chance de tendre vers un spectre harmonisé pour l’Europe et je pense qu’il faut la saisir. Ce n’est pas faire le choix de la 400 ou de la 700 mais le choix de la cohérence en matière d’interopérabilité mais aussi de coûts » et de poursuivre « avec la mise en place d’un système unique opéré, les coûts d’acquisition mais aussi de maintenance sont partagés. On ne parle donc plus de retour sur investissement mais bien d’économies immédiates réalisées dès le déploiement dudit réseau. Avec l’état de nos finances, ce devrait être un point à prendre également en compte. » Pour l’heure, aucun chiffre n’est annoncé pour corroborer cet argument économique mais une étude regroupant plusieurs constructeurs est en cours de réflexion afin d’apporter des éléments « concrets et objectifs » au ministère. Des premiers résultats attendus d’ici à la fin de l’année.

      Les pré-choix des différents États en la matière devraient avoir lieu entre 2013 et 2014, juste avant que la Conférence mondiale des radiocommunications de novembre 2015, qui se tiendra à Genève, ne définisse les fréquences radio de la sécurité publique dans le monde. Dès lors, et compte tenu d’une réponse collective qui semble s’orienter vers une bande 700 MHz, Motorola annonce clairement qu’en cas de maintien du positionnement de la France sur une gamme à 400 MHz, il ne se positionnera pas sur le marché « les coûts seront trop prohibitifs », précise Guy Mans. Quand à Thales, le groupe vient de remettre une offre spontanée au ministère de l’Intérieur.

      Beaucoup de zones d’ombre continuent donc de peser sur ce dossier sensible. Reste qu’une concertation serait des plus louables pour penser et définir une stratégie qui engagera la France pour des décennies. Mais aussi pour que ce dossier d’envergure donne naissance à un véritable outil de dernière génération capable de répondre à toutes, ou quasi, les exigences des primo-intervenants de la sécurité et ce en tenant compte de l’aspect financier non négligeable. Une décision de cohérence donc, mais qui devra se faire rapidement au vu des pré-choix à formuler d’ici à l’année prochaine.
      Gilles Brégant, directeur général de l’ANFR, soulignait déjà lors de ses vœux de début d’année : « La France n’est pas une île, et elle devra agir de concert avec ses voisins d’Europe occidentale ; ma responsabilité à la tête du RSPG en 2013 me permet de l’affirmer : ce n’est pas uniquement un sujet français, il concerne toute l’Europe occidentale, et l’Europe devra avoir un mouvement coordonné le moment venu. » Un réseau qui devrait voir le jour à l’aube 2020, au mieux… oui mais « c’est en 2013 qu’il faut parler lucidement de ce qui se passera à partir de 2020 : certes, nous avons sept années avant d’agir à grande échelle ; mais ce ne sont pas sept ans de réflexion. Des arbitrages de long terme devront donc être pris, c’est la tâche la plus noble qui soit dans l’action de l’État. »

      For the issue of the operational objectives of the new network, all are agreed that it needs a system able to process voices, image data, video and access to remote databases and the internet. For this it needs extra bandwidth for the data stream and hence broadband.
      Currently, commercial operators choose LTE (Long-Term Evolution) technology to increase their network capacity and handle new applications. Manufacturers like Motorola Solutions and Thales are unanimous about using LTE.
      The LTE solution has to interoperable, resilient, encrypted, sealed and impenetrable, shared, independent of public operators and operated. A common, non-proprietary network which allows for swift distribution of videos between ‘field workers’ and control centre, telemedicine for the fire services, swifter response for investigations by remote access to secure databases, etc.
      Deployment of the LTE network is now accepted in the United States which recently announced a budget for it of about 10 billion dollars over the next 10 years, with operation by FirstNet in the single spectrum band of 700MHz, the spectrum at the origin of the discussion in this article. That said, the issue is not so much about choosing the spectrum as about choosing consistency. At a time when nearly all the countries in Europe and the rest of the world are opting for 700MHz, France is sticking to its guns and wants to keep its current spectrum of 400MHz. The ministry is supporting this argument and wants to “show international authorities the relevance of the 400MHz frequency spectrum and the feasibility of a network using 4G LTE technology in this spectrum” with the provider Cassidian.
      “We have the opportunity to move towards a common spectrum for Europe and so we must grasp it and choose consistency in interoperability and in cost. With a single operated system, acquisition and maintenance costs are shared and hence save money immediately.” The governments must make their pre-choice by 2014, before the World Radio Communications Conference in November 2015 defines the radio spectrums for public security around the world. Motorola has clearly stated that it will not position itself on an open market for 400MHz. As for Thales, the group has submitted a spontaneous offer to the Ministry of the Interior.
      Still, it would be very worthwhile to hold discussions to think about and define a strategy which will commit France for decades. A network which will come into being around 2020, at the earliest…