Mireille Ballestrazzi, Présidente d’Interpol – INTERPOL : « Relier les polices pour un monde plus sûr »

Mireille Ballestrazzi, Présidente d’Interpol – INTERPOL : « Relier les polices pour un monde plus sûr »

Mireille Ballestrazzi, présidente d’Interpol. © SICOP

INTERPOL est l’organisation internationale de police la plus importante au monde, avec 190 pays membres. « Notre rôle est de permettre aux polices du monde entier de travailler ensemble pour rendre le monde plus sûr. » Rencontre avec Mireille Ballestrazzi, présidente d’Interpol.

Avec une infrastructure de pointe, Interpol apporte un appui technique et opérationnel, aide à relever les défis – de plus en plus nombreux – de la lutte contre la criminalité au XXIe siècle, notamment le terrorisme, le trafic de drogue international et le blanchiment d’argent, la fraude organisée, la contrefaçon et la contrebande de médicaments, mais également la cybercriminalité, la traite des êtres humains ou encore la pédophilie.

Un appui opérationnel

Le rôle d’Interpol est de fournir les outils efficaces et adaptés aux polices du monde entier pour qu’elles puissent à leur tour conduire leurs missions avec efficience. Pour cela, nous disposons d’un maillage géographique très structuré. Le secrétariat général d’Interpol se trouve à Lyon et fonctionne 24 heures sur 24, 365 jours par an. Il intègre un centre de commandement et de coordination chargé de fournir un soutien opérationnel aux pays membres en temps réel, et ce 24 heures/24, 7 jours/7 notamment en cas de catastrophe ou d’attentat comme ce fut le cas, il y a peu de temps. L’organisation compte également sept bureaux régionaux à travers le monde ainsi que des représentations auprès des Nations Unies, à New York, et de l’Union européenne, à Bruxelles. Enfin, dans chacun des 190 pays membres, un Bureau central national est implanté dont l’effectif est composé de fonctionnaires hautement qualifiés de ses services chargés de l’application de la loi. Chaque membre est ainsi connecté au système mondial de communication policière “I-24/7” (Interpol – 24 heures par jour, 7 jours par semaine). Ce réseau sécurisé permet la transmission instantanée de l’information policière et donne accès immédiatement aux outils d’Interpol, notamment aux bases d’informations riches de 48 millions de données, qui font l’objet, chaque jour, de 2,8 millions de recherches. Le travail de synergie effectué permet quotidiennement 27 arrestations, la découverte de 170 documents de voyage volés ou perdus, et le sauvetage de 1 voire 2 enfants victimes d’abus sexuels.

Innovation et cybersécurité

Parallèlement à cela, l’innovation doit devenir notre meilleure alliée. Dans l’exercice de leurs fonctions, les polices doivent faire face à de nouvelles menaces, à un contexte en évolution et en mutation constantes. Aussi, pour y faire face, nous devons nous doter de nouveaux outils et ainsi garder irrémédiablement un temps d’avance sur le monde criminel.

Aussi, avons-nous créé le Complexe mondial Interpol pour l’innovation, qui ouvrira ses portes à Singapour en septembre 2014. Il accueillera essentiellement des activités qui font partie des menaces émergentes et qui exigent de forts investissements technologiques, à savoir, la lutte contre la cybercriminalité. Outre ses capacités de détection des infractions et d’identification des auteurs, ce centre mettra en œuvre des formations innovantes à destination de tous les pays membres et apportera bien entendu un appui opérationnel. Cette position renforcera notre présence en Asie. Une orientation clairement tournée vers l’innovation qui nous ouvre aujourd’hui de nouvelles perspectives. Notre travail en collaboration avec Europol notamment, mais pas seulement, démontre que la cybersécurité est aujourd’hui une priorité pour tous les États du monde. Enfin, grâce à la recherche, nous devons impérativement nous moderniser, et travailler à la consolidation du cadre institutionnel.

De nouvelles menaces 

D’autres menaces telles que les atteintes à l’environnement ou encore l’exploitation des êtres humains figurent également parmi les priorités d’Interpol tout comme le trafic de médicaments falsifiés qui connaît un accroissement très important dans les pays pauvres ou les pays en voie de développement et qui plus est, avec l’usage démocratisé des nouvelles technologies. Nous avons initié en 2008 une première opération dénommée “Pangea” contre la vente de médicaments contrefaits et illicites. De 10 pays participants à l’origine, nous sommes passés à 99 aujourd’hui. Ces opérations annuelles ont notamment conduit à des interpellations dans le monde entier, à des saisies de milliers de médicaments ainsi que l’identification et la fermeture de sites illégaux de vente en ligne. 

L’Afrique, une priorité

Un problématique qui concerne notamment, mais pas exclusivement, le continent africain. J’ai par ailleurs assisté en novembre dernier à une conférence sur ce sujet au Niger. L’Afrique est une zone qui nécessite une attention particulière en matière de contrôle aux frontières avec les problématiques de trafic d’êtres humains, d’armes ou d’ivoire. L’Afrique de l’Ouest est une priorité avec les problèmes de narco-trafic, de terrorisme et de déstabilisation politique. Plus de 129 projets ont été initiés en Afrique et parmi eux, le projet WAPIS/SIPAO en Afrique de l’Ouest développé en partenariat avec l’Union européenne. J’ai pu constater lors de mes déplacements dans la région l’importance de la valeur ajoutée qu’il allait apporter en termes de sécurité. Cette année, la région africaine va adopter sa nouvelle stratégie pour la période 2014-2016. Cette stratégie guidera le programme d’activités mis en œuvre dans cette région. Développer avec nos pays membres une réflexion prospective sur les enjeux à venir est crucial pour l’organisation.

Une réflexion globale et commune que Madame Ballestrazzi, lors de la 22e conférence régionale Afrique en septembre dernier, appuyait des mots prononcés près de vingt ans auparavant, en mai 1994, par Nelson Mandela dans son discours d’investiture : « Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès. 

INTERPOL with 190 member countries is the biggest international police organisation in the world. “Our role is to enable police forces to work together to make the world safer to live in.” Interview with the head of Interpol, Mireille Ballestrazzi.

With its advanced infrastructure, Interpol can offer technical and operational support to help combat terrorism, international drug trafficking, medical drug counterfeiting and smuggling, cybercrime, the slave trade and paedophilia. For this we have a tightly meshed geographical network and command and coordination systems working round 24/24, 365 days a year. Every member is connected to the global police communication system “I-24/7”. This secure network ensures instant transmission of police information and immediate access to the Interpol tools and databases containing 48 million data which are used for 2.8 million searches a day. This mutual effort leads to 27 arrests and the rescue of 1 or 2 sexually-abused children every day. Interpol is actively committed to innovation with the Global Complex for Innovation which will be launched in Singapore in September 2014. The complex will mainly work on controlling cybercrime (detecting offences, identifying perpetrators, training for member countries). Africa requires some special attention. The WAPIS project developed in partnership with the European Union will offer added value for its security.