La cartographie radiologique bientôt automatisable par drone

Après les robots multi-taches capables d’intervenir en zone nucléaire, de cartographier le terrain, de prélever des échantillons et de mesurer la radioactivité sans exposer le personnel et les drones d’investigation radiologique conçus pour intervenir à l’intérieur des installations nucléaires, un nouvel outil s’invite à la table des innovations, en passe de devenir l’outil indispensable, les drones à vocation spécialisée de détection et d’identification de matières nucléaires et radiologiques.

Mesurer, cartographier, identifier, confiner 

Depuis plusieurs décennies, l’agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), le service de protection radiologique des armées (SPRA), l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et la société française de radioprotection (SFRP) travaillent à mesurer, cartographier, identifier, confiner les radionucléides afin d’en limiter les nuisances. Aussi, en raison d’incidents, d’accidents, voire de disséminations volontaires (terrorismes), ces radionucléides peuvent se retrouver dans tous types d’environnement, difficilement accessibles.

De nombreux systèmes terrestres ont été mis au point afin de mesurer au plus près ces risques, mais lorsque la dissémination est trop grande en surface et que le rover ne peut plus accomplir son travail, le seul recours actuellement est l’hélicoptère. Ce moyen aérien, lourd et cher, limite les interventions. Cette solution fut notamment utilisées pour mesurer le niveau de radiation à Fukushima après la catastrophe de 2011. Deux ans après, un peu plus de 300 000 personnes n’avaient toujours pas été en mesure de retrouver leurs foyers en raison des niveaux élevés de radiation. Le gouvernement japonais après avoir utilisé les hélicoptères avaient donc décidé en 2013, en raison des coûts engendrés et des résultats obtenus approximatifs, d’envoyer des drones pour obtenir des données plus précises. Des relevés avaient été effectué à l’école élémentaire de Yamakiya (à 40 km de l’usine) en utilisant un Hexacopter Mini-Surveyor équipé d’un compteur Geiger.

En 2013, les autorités françaises avaient également lancé un appel d’offres pour le ministère de la défense afin d’étudier les capacités des drones en matière de détection nucléaire, biologique et chimique. L’entreprise EURIWARE, filiale IT d’Areva, racheté la même année par Capgemini, avait alors remporté le marché pour un montant de 205000 euros hors TVA. Les avancées technologiques attendues à l’époque, portaient d’importants espoirs, les drones pouvant être un outil précieux pour l’inspection et la détection préventive des incidents nucléaires, notamment.

Radiamètre et spectromètre embarqués 

Depuis 4 ans, des entreprises, PME, chercheurs, académiques et experts, ont continué leurs travaux.

Parmi eux, le groupe SDS qui intervient sur le marché de la radioprotection sous sa marque IMS (Innovation and Measurement Systems), pépite française créée en septembre 2011 à la suite d’un transfert de technologie du CEA LIST Centre de Saclay. Illustrant le reflet de ces PME à taille humaine qui portent l’innovation en matière de haute technologie sur le sol français, les équipes de Bernard Leibovici, Président de SDS ont imaginé faire embarquer un radiamètre et un spectromètre dans un drone conçu à cet effet, afin de pouvoir mesurer, identifier à distance et cartographier rapidement un territoire. « Les instruments IMS, très légers et communicants, représentent un intérêt croissant en matière d’équipements de drones et de robots. Les organismes doivent s’adapter pour contrecarrer les nouvelles menaces. La demande de véhicules télé-pilotés équipés est en très nette augmentation. » précise Bernard Leibovici.

Disponibilité imminente

D’ici à la fin de l’été, en collaboration avec ADT Drones, jeune startup, SDS présentera son drone portant, sur deux nacelles différentes et orientables, les capteurs IMSRAD. Ce drone d’une grande stabilité permettra de réaliser des mesures fixes à distance, dans des environnements humides. Il pourra également réaliser automatiquement des cartographies fines de grandes surfaces potentiellement contaminées.

Pensé pour l’action, ce drone ainsi que sa station sol seront transportables aisément dans un sac et déployables en moins de 5 minutes.

Cette innovation s’adresse à la surveillance des  :

• Installations nucléaires de base

• Installations critiques en particulier sites sensibles Seveso

• INB en démantèlement nucléaire

• Installations de traitement de déchets

• Points d’importance vitale

• Lieux accueillant du public

Des performances uniques

Le système SDS-ADT Drones permet à l’opérateur du drone ou à une base arrière (jusqu’à 1 km) de contrôler les paramètres de surveillance, le débit de dose, les spectres et leur identification en temps réel, le positionnement du drone sur une carte et les alarmes déclenchées.

Avec un poids de 4 kg, l’autonomie de ce drone est de 30 mn.

De plus un drone spécifique débit de mesure radiologique à l’encombrement réduit, sera développé en fin d’année 2017. Sa distance de pilotage sera de 4 kms en UHF (en raison des limitations de puissance d’émission de liaisons de données de l’ANFR) et de 70 kms en GSM. Avec un poids de 2 kg, l’autonomie de ce drone sera de 40 mn.

Les conditions d’utilisation autorisent un vol hors visibilité pour une plus grande sécurité des opérateurs, une navigation automatique pour la rapidité et la reproductibilité des mesures et une cartographie automatique du terrain. Par ailleurs qualifié par la direction générale de l’aviation civile, il pourra voler en mode S1, S2 et S3 (trois scénarios de vol issus de la réglementation aérienne du 17 décembre 2015) et pourra donc intervenir partout où cela sera nécessaire.  Sa technologie de transmission de données lui permettra de s’acclimater aux environnements urbains (par l’utilisation des réseaux GSM) ou encore ruraux (par l’utilisation de liaisons UHF), dans les limites fixées par l’agence nationale des fréquences (ANFR).

Le drone radiologique deviendra dans un avenir très proche l’outil indispensable de la surveillance des installations nucléaires, de cartographie radiologique en cas d’incidents, d’accidents voire d’actes de malveillances (bombes sales).

Des gestionnaires de sites d’importance vitale français s’intéressent déjà de très près à ce dispositif dont l’expérimentation tactique est déjà programmée à la rentrée septembre. Avec 1381 sites d’importance vitale identifiés, l’avenir semble prometteur pour nos deux PME.

Et SDS ne cache pas ses ambitions à l’export. « Nous avons gagné nos lettres de noblesse avec le transfert de technologie du CEA. Nous avons depuis consolidé notre expertise, notre savoir-faire et affirmé notre légitimité avec des projets porteurs, des mises en œuvres opérationnelles et efficaces auprès de clients français renommés. Cela nous permet de nous tourner vers le marché mondial. » conclut Bernard Leibovici. La République de Singapour a déjà fait connaître son vif intérêt pour cette solution qui devrait être disponible et parfaitement opérationnelle d’ici à la fin de l’année…

Des atouts majeurs

L’utilisation des drones pour la mesure est une technologie mature du fait du développement des porteurs et de leur pilotage, de la miniaturisation des capteurs et du traitement automatique des données. Leur utilisation permet des économies en termes de temps et de moyens à mettre en œuvre et de sécuriser les prestations de contrôle par la réduction des risques et la limitation de l’exposition des personnels aux rayonnements ionisants.