Vers une vision partagée de la gestion du risque

vision partagée de la gestion du risque

Constat unanime et incontestable, les risques majeurs sont désormais pris en considération dans quasi tous les domaines : environnementaux, climatiques/sismiques, industriels, NRBC… Ainsi, tous les acteurs internationaux concernés, publics ou privés, présenteront, lors de cette édition Milipol Paris 2015, leurs solutions globales et spécifiques, ainsi que leurs innovations au cœur d’un espace Risques majeurs qui ne cesse de monter en puissance…

Créé lors de l’édition Milipol Paris 2009, l’espace “Risques majeurs” connaît un développement croissant au cœur de cette manifestation d’envergure très attendue dans le milieu de la sécurité. « Cet espace regroupera les produits, technologies et services dédiés aux solutions globales de prévention et de gestion des risques majeurs couvrant les domaines des risques technologiques/industriels, naturels, sanitaires et les menaces majeures. Cette année, il s’enrichira des problématiques que constituent les interventions des pompiers, de la protection civile et des premiers secours, qui se traduiront notamment par la tenue d’ateliers et de tables rondes », explique Muriel Kafantaris, directrice des salons Milipol.

Vision partagée de la résilience urbaine aux risques

La densité de nos zones urbaines, la multiplication des enjeux, l’interdépendance des réseaux techniques et des services vitaux (électricité, assainissement et distribution d’eau, transports, télécommunications, etc.) nécessitent de construire une vision partagée de la résilience urbaine aux risques.

L’ouragan Katrina à la Nouvelle-Orléans, le tsunami au Japon, et plus récemment le tremblement de terre au Népal, les inondations au Myanmar ou encore les explosions en Chine… ces catastrophes naturelles, technologiques ou industrielles, révèlent notre vulnérabilité croissante aux risques. Cette exposition aux risques implique de développer la résilience de nos sociétés – c’est-à-dire leur capacité à résister aux conséquences d’une catastrophe majeure, puis à rétablir rapidement leur fonctionnement normal.

L’exemple parisien ou la menace d’une crue

L’aire urbaine de Paris – 12 300 0000 habitants, plus de 700 000 entreprises et des millions d’emplois concentrés sur une superficie relativement restreinte – illustre bien cette problématique. La densité de la population et la concentration des activités, des habitats et des réseaux font que cette agglomération serait particulièrement exposée en cas de catastrophe. La multiplicité des enjeux à prendre en compte, la diversité des risques et la complexité de la gouvernance de l’aire urbaine en font un bon exemple des contraintes et des défis liés à l’amélioration de la résilience urbaine des grandes agglomérations face aux risques.

L’événement naturel le plus dévastateur pour l’aire urbaine de Paris serait une crue d’occurrence centennale, d’une ampleur comparable à celle qui submergea Paris en 1910. C’est pourquoi l’hypothèse d’une crue majeure en Île-de-France fait l’objet depuis une quinzaine d’années d’une attention particulière de la part des pouvoirs publics, associés aux acteurs de la prévention et de la gestion du risque.

« L’urbanisation rapide et les conséquences du changement climatique – le risque d’inondation devrait augmenter de manière significative dans les années à venir – augmentent à la fois la probabilité de l’aléa et sa gravité. Il est nécessaire pour toutes les villes de s’adapter aux changements à la fois climatiques et socio-économiques en développant de nouvelles stratégies de gestion du risque d’inondation », souligne le site portail thématique du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie dédié à la prévention des risques majeurs.

Les acteurs de la prévention, ceux de la sécurité civile ainsi que les élus locaux travaillent à diminuer la vulnérabilité des zones urbaines situées en zones inondables. Ce travail porte, entre autres, sur la prévention – connaissance de l’aléa, information, réglementations, aménagements –, l’évaluation affinée des enjeux en zones inondables, ainsi que sur l’étude des conséquences d’une crue majeure sur les systèmes et sur les réseaux critiques.

Vers une approche collaborative

Pour autant, les dispositions prises suffisent-elles à construire la résilience urbaine de l’agglomération parisienne ? Il semblerait que la réponse soit négative. Dans une « Note rapide », l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme d’Île-de-France (IAU) pointe des lacunes, parmi lesquelles : des degrés d’avancement différents dans les diagnostics de vulnérabilité ; la superposition des périmètres de gouvernance ; l’hétérogénéité des stratégies de gestion du risque, la difficile gestion des interdépendances entre les opérateurs. L’IAU affirme « la nécessité d’une approche collaborative renforcée basée sur la transversalité ; du partage de l’information et de la mutualisation des connaissances entre opérateurs – rendus parfois difficiles pour des questions de concurrence, de sécurité, ou de complexité grandissante. Il faut construire une vision partagée des enjeux et favoriser l’élaboration de solutions intégrées. »

Les stratégies d’adaptation et de gestion du risque évoluent mais elles restent encore souvent défensives. « Penser la gestion des risques à partir du concept de résilience urbaine impose une pensée prospective et innovante, une approche dynamique et intégrée qui considère la totalité des dimensions du système urbain. » L’un des principaux enjeux est d’intégrer ces objectifs de résilience dans les réflexions d’aménagement et de développement de nouvelles infrastructures et réseaux.

Le rôle des collectivités locales sera prépondérant en cas de crise, qu’il s’agisse de la réponse organisationnelle, de la solidarité à mettre en œuvre, ou du maintien de la continuité des services publics.

La Ville de Paris, en collaboration avec la zone de défense et de sécurité, s’est engagée dans ce processus. Elle réunit régulièrement une quinzaine d’opérateurs de réseaux, pour faire connaître et partager les décisions qui seraient prises en cas de crue exceptionnelle de la Seine.

435 000 logements, 830 000 habitants, 100 000 entreprises et 750 000 emplois sont directement exposés au risque inondation en Île-de-France. Plus de 1 000 milliards de dollars par an… c’est le coût estimé total des inondations dans les grandes villes côtières de la planète à l’horizon 2050, si rien n’est fait pour endiguer la menace.

Cette approche globale et collaborative sera au cœur des débats de Milipol Paris 2015. De nombreuses questions auxquelles vont tenter de répondre près d’une trentaine d’exposants réunis sur un même plateau. Éléments relatifs à la protection de sites sensibles, habillement protecteur spécifique, drones ou encore technologies de prévention et traitement de l’eau pour la rendre potable dans le cadre d’un tremblement de terre, par exemple, « autant d’éléments clefs qui ont leur place au cœur de Milipol Paris, salon mondial dédié à la sécurité intérieure des États », rappelle sa directrice, et de poursuivre : « En effet, la protection des populations et des biens est un rôle important dans la sécurité des États. Aussi, avec l’élargissement de cette plateforme Risques majeurs, Milipol Paris répond à une demande grandissante d’informations, de conseils, de moyens et de technologies dédiées et ce, dans une approche globale. »

Emily Hough, éditeur en chef, Crisis Response, membre du comité d’experts de Milipol Paris 2015, revient sur les challenges à venir et les principales innovations dans le secteur des risques majeurs.

En ce qui concerne les thèmes clés et les challenges à venir, je considère que ceux-ci résultent en particulier du climat et de la géopolitique. La plupart des facteurs de crise et scénarios catastrophe en découlent.

Une gouvernance, des investissements et des équipements vont être requis pour faire face aux nouvelles menaces et aléas que représentent ces deux sujets particulièrement et totalement interconnectés.

Des challenges multiples

Vu sous un angle global, il est incroyable de réaliser à quel point un simple « smartphone » a révolutionné l’univers de la préparation et de la réponse aux problèmes de sécurité et de gestion de crise. Avec l’accès aux réseaux de communication démultipliés (grâce aux photos et vidéos sur le terrain et dont la valeur de preuve est inestimable), en permettant aux personnes habitant dans des régions éloignées d’appeler les secours, ainsi qu’avec un nombre incalculable d’applications dédiées à la réponse aux urgences, à l’éducation et aux villes sûres, le smartphone a contribué à créer de véritables communautés virtuelles. Il en advient une interaction sociale et la construction d’un monde plus résiliant.

En même temps, nous constatons un développement de multiples technologies qui transforment le paysage de la gestion des crises et des urgences, de la préparation à la réponse. Ces technologies disposent d’un potentiel immense… mais comme pour toute innovation, la question de la mauvaise utilisation d’un outil, au départ formidable, demeure un challenge en soi.

Les grandes tendances technologiques

Les tendances à venir, en matière de technologie dans les domaines de la sécurité, de la sûreté et de la réponse en temps de crise, se portent sur les drones et la robotique, le Big Data et l’impression 3D.

Les drones sont déjà utilisés dans de nombreux cas, pour le sauvetage et des applications humanitaires, à partir des organes de contrôle, pour la surveillance, l’espionnage, la reconnaissance, les livraisons de médicaments et produits humanitaires dans des régions éloignées ou inaccessibles, ainsi que les secours.

C’est évidemment la même chose pour la robotique développée et créée pour opérer dans des situations et environnements complexes tels que des immeubles en feu où ils pénètrent dans les crevasses créées par l’effondrement des bâtiments lors d’un tremblement de terre, par exemple.

Il y a aussi le développement des exosquelettes et des nanotechnologies pour traiter les lésions et les blessures ; certains hôpitaux ont même déjà des robots pour la distribution du pressing et des repas. Cette tendance va sans aucun doute se développer.

Pour les catastrophes naturelles ou autres grandes catastrophes, les agences, départements et gouvernements ont utilisé des données pour effectuer la coordination des urgences, surtout par l’utilisation d’images satellites, entre autres sources. Les médias sociaux et le crowdsourcing nous ont amené dans l’ère du « temps réel » dont les données sont engendrées par les utilisateurs et augmentant ainsi la banque de données utilisables. L’essor de l’ « humanitarisme digital » va continuer. Les banques de données sont également précieuses pour effectuer le tracking et le monitoring des crises pandémiques. De plus, il y a une réelle utilité pour le Big Data en réponse aux situations de crise (note : la US National Science Foundation et la Japan Science Technology Agency travaillent ensemble pour trouver des solutions aux problèmes que se posent les analystes de Big Data en cas de situations d’urgence). Ceci nous mène naturellement à l’IA, l’Intelligence Artificielle, et l’AIDR (Artificial Intelligence for Disaster Response), une plateforme du Web qui aide à identifier les Tweets liés aux situations de crise, les tags et les « customise » pour aider le système à identifier les mises en ligne liées à des situations de crise.

L’utilisation de l’IA pour des applications de situations de crise plus larges est une tendance à suivre de près.

Bien que lente et chère pour le moment, les applications de l’impression 3D sont immenses. Une fois que cette technologie particulière aura évolué, elle pourra imprimer des pièces de rechange pour des applications médicales ou pour les ressources humanitaires dans des régions coupées du monde, en imprimant des matériaux à la demande et en temps de crise.

Afin d’accompagner au mieux l’efficience de ces technologies au service de la gestion des crises, il est aujourd’hui vital d’en maîtriser les usages et les limites pour ne pas voir dériver de leur objectif premier ces innovations fantastiques. Un travail en coopération et en collaboration est nécessaire. Une réponse globale à une situation de crise est possible, efficace et effective seulement si tout le monde travaille et s’exerce ensemble, en vue des situations d’urgence, en amont de la crise.

Sources – site portail thématique du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie dédié à la prévention des risques majeurs.