L’entreprise est confrontée à des risques nouveaux, évoluant dans des environnements instables et aux menaces polymorphes. Cible de prédateurs en tous genres, elle est aujourd’hui contrainte d’intégrer au cœur de sa stratégie une direction de la sûreté. Nom barbare encore méconnu, elle est pour autant aujourd’hui essentielle pour protéger les personnes et les biens, les informations et l’image de l’entreprise.
Rencontre avec Jean-Louis Fiamenghi, préfet – ancien patron du RAID et du SPHP, connaissant bien les institutions et leurs rouages du ministère de l’Intérieur – aujourd’hui directeur de la sûreté chez Veolia.
Au plus haut niveau de l’entreprise
La direction de la sûreté a vu le jour chez Veolia suite à la demande d’Antoine Frérot, PDG du groupe « sur la base d’un projet que je lui avais soumis . Le milieu de la sécurité privée m’intéressait beaucoup, c’était un véritable challenge – encore un. J’ai donc travaillé sur un concept intégrant très en amont la sureté comme prévention situationnelle afin d’en dégager des économies . Une direction de la sûreté intégrée au plus haut niveau de l’entreprise, puisque je suis rattaché au président-directeur général, ce qui permet à cette dernière d’être associée à la stratégie de l’entreprise. Son action en est d’autant plus significative, sa reconnaissance multipliée et son efficacité accrue. La corrélation des activités ou encore la dépendance aux systèmes d’informations pour ne citer que ces deux, peuvent jouer un impact aux conséquences parfois dramatiques pour les personnels, les clients, les biens, l’information mais aussi l’image de l’entreprise. La fonction de sûreté, longtemps considérée comme une fonction secondaire, devient désormais une fonction stratégique au sein des entreprises. »
Enjeu de confiance et de compétitivité
Opérateur d’importance vitale, Veolia possède « une obligation de sûreté de fait. Mais c’est aussi faire preuve de raison que de prendre conscience de l’importance de la sûreté dans une entreprise de cet ordre, et de mettre ainsi tous les moyens nécessaires à la bonne exécution de cette mission. Les enjeux sont en effet très importants. De la même manière que l’on présente désormais des données sociales et environnementales pour rassurer les clients, les investisseurs ou l’État, les indicateurs présentant et évaluant les mesures de sûreté, le dispositif général, les actions ou encore les audits sont aujourd’hui des éléments clefs qui placent la sûreté comme étant un enjeu indéniable de confiance, de compétitivité et de stabilité. Une fonction qui est ainsi associée aux termes de qualité et de développement durable au sein de l’entreprise et qui influe directement sur la gouvernance de l’entreprise. Une entreprise bien dirigée est une entreprise sûre et sécurisée. »
Une aide à la décision
Le directeur sûreté définit et s’assure de la mise en application des politiques de mise en sûreté « dans l’ensemble des pays où l’entreprise est présente. L’ensemble de nos dispositifs concourent à protéger les employés, les dirigeants, les clients, tout comme le matériel ou encore le patrimoine de l’entreprise, contre toutes formes et typologies de menaces ou de risques. En cela, le directeur sûreté intervient en matière de prévention, de conseil et de réaction. Il concourt ainsi au développement de l’activité en aidant les dirigeants à la prise de décision rapide et juste, le tout en sécurisant les opérations. À la fois manager et chef d’orchestre, je crois que ce poste exige un sens aigu de la stratégie et une capacité à faire face à l’imprévu. Mais je crois que c’est aussi un véritable parcours d’humilité, tant dans la mise en place d’une direction que dans la conduite du quotidien. »
Capacités d’adaptation et de réaction
Direction désormais inévitable de toute entreprise moderne, la direction sûreté « est encore une fonction de l’entreprise énigmatique, peu ou mal comprise. Son rôle doit donc être expliqué, détaillé en interne de l’entreprise. Pour qu’il soit accepté et valorisé, il doit être apprivoisé. Cela passe par des actions de communication interne, mais aussi de la formation. Il nous faut aussi être et rester à l’écoute. Trois compétences essentielles nous sont aujourd’hui rattachées. La protection des biens et des personnes, la sûreté informationnelle et la sécurité des systèmes d’information pour lutter contre toute forme de cybercriminalité, auxquelles il convient d’ajouter bien évidemment la gestion de crise. La mise en place de veille et d’analyse de la menace est indispensable pour un traitement des données adapté aux particularités de Veolia, tout comme notre mission opérationnelle organisée autour des sept membres permanents installés au siège de Veolia, travaillant de concert avec un correspondant sûreté dans chaque pays où notre entreprise est présente( soixante correspondants dans le monde entier). Notre réseau est ainsi capable, en situation de crise, d’organiser dans toutes nos filiales la sûreté des personnes et la protection des infrastructures. La protection des collaborateurs en déplacement ou en affectation dans des pays difficiles, la protection des systèmes d’information et du patrimoine de l’entreprise sont des missions essentielles de la direction sûreté de Veolia. Nous devons donc, pour être efficaces, démontrer d’une capacité d’anticipation, de réaction mais aussi de retours d’expérience et d’analyse post-événementielle. Nous intervenons également dans le cadre de la lutte contre la fraude, avec la mise en place d’un travail commun avec la répression de la délinquance financière. C’est un travail que nous conduisons avec notre correspondant en Chine notamment, via la mise en place d’un système luttant contre le détournement. »
Des objectifs communs avec l’État
Dans certains de ces domaines, l’État peut apporter sa contribution. La carrière de Jean-Louis Fiamenghi au sein du ministère de l’Intérieur est incontestablement d’une aide précieuse. « Sur des points clefs comme l’échange d’informations sur la situation des pays qui concernent l’activité quotidienne de Veolia, par exemple, nous travaillons de concert avec l’État, tout comme sur la diffusion d’alertes sur les menaces visant les systèmes informatiques ou l’apparition de nouveaux modes opératoires frauduleux, par exemple. Cela peut porter sur des vols de données, des atteintes à l’intégrité des systèmes, de l’espionnage économique ou stratégique ou encore des cyber-attaques visant à endommager des équipements ou à perturber nos activités. Un travail commun qui nous permet de gagner en réactivité et en précision. Nous avons des objectifs communs évidents, la protection de nos ressortissants tout comme de nos savoir-faire. »
Des projets d’envergure
Des connaissances et une expertise qui donnent naissance à de nouveaux projets. « Nous avons travaillé, lors de la 7e édition des Jeux de la Francophonie qui s’est déroulée du 7 au 15 septembre dernier, en collaboration avec le RAID et la DCI dans le cadre d’un dispositif NRBC permettant de vérifier la potabilité de l’eau en temps réel, que ce soit sur la zone qui accueille les dirigeants et chefs d’État, que celle des athlètes. Cela passe notamment par la mise en place de capteurs intelligents. Un travail collaboratif qui nous a permis de tester un nouveau dispositif encore jamais éprouvé en France et qui va nous permettre de valider ou non des processus, des schémas et d’étudier la faisabilité de transposition de cet exercice sur d’autres lieux recevant beaucoup de public ou lors de grands événements. Des projets d’envergure sont à l’étude dans le cadre du développement de cette coopération… » Mais, sécurité et sûreté oblige, nous n’en dirons pas plus…
Security, a new strategic function in businesses, with Jean-Louis Fiamenghi, security manager at Veolia.
The security department at Veolia, a crucial operator, “is integrated at the highest level of the company as part of its strategy. This function had always been considered as secondary but is now strategic in businesses. The indicators involving and assessing security measures, the overall system, actions and audits definitely make security an issue of confidence, competitiveness and stability.”
The security manager defines security policies and has them implemented “in every country where the company is established. He warns, advises, reacts and helps the management to take the right decisions quickly. The department has three major competencies. Protection of people and property, information and IS security and crisis management. In an emergency, our network (seven permanent members and sixty agents across the world) can organise personal security and infrastructure protection. We work together with the State to exchange information on the situation in the countries where Veolia works on a daily basis, or to broadcast alerts on threats to IT systems. We have lately been working with the RAID serious crime force and the DCI defence assistance on a device relating to NRBC threats to test the safety of drinking water in real time using smart sensors. This collaboration and new system are a first in France and could well give rise to some far-reaching projects…”