Servir l’avenir… de la cybersécurité !

Servir l'avenir... de la cybersécurité !

Rencontre avec Pascal Lagarde, directeur exécutif, International, Stratégie, Etudes et Développement Bpifrance

Dans le cadre d’un marché qui se structure en France, encouragée par les nouvelles technologies et poussée par la montée en puissance des attaques internet et une prise de conscience par les chefs d’entreprise, la cybersécurité pourrait, à terme, représenter une vitrine de la compétitivité française.

Pour cela, la filière, aujourd’hui atomisée, doit se structurer. Les nombreuses PME et start-up françaises ont besoin d’être accompagnées, conseillées et d’accéder à des financements et outils qui leur permettront de conquérir de nouveaux marchés, de nouveaux clients et ce y compris sur la scène internationale.

Transition numérique et compétitivité

La réglementation en matière de protection contre les cyber-risques s’est durcie et cela concourt directement à la dynamique de ce secteur. En effet, la sécurité informatique est un élément incontournable de la compétitivité des ETI et des PME. Il y a évidemment la notion de protection, mais c’est aussi et surtout un sceau de qualité pour l’entreprise, notamment dans son développement à l’export. C’est pour cela que nous en faisons un thème important des diagnostics stratégiques ou de formations que Bpifrance propose aux entrepreneurs. Les besoins d’investissement des entreprises pour assurer leur transition numérique, y compris la sécurité, sont en grande partie immatériels. Ainsi, nous avons développé le prêt “industrie du futur” qui permet de les accompagner. Ce sont des prêts de 100 000 à 5 millions d’euros sans garantie ni caution. D’une durée de 7 ans et avec un différé des amortissements sur 2 ans, ces prêts sont véritablement taillés pour réaliser ces investissements immatériels.

La création de prestataires de cybersécurité champions dans leur domaine est par ailleurs essentielle. Un marché qui croît en France d’environ 10 % par an, ce qui est un bon rythme. Cependant, le secteur est encore trop fragmenté. Rien que sur la France, nous avons recensé 225 PME et TPE de cybersécurité, allant des boîtiers de protection aux tests d’intrusion. Or, seules 30 d’entre elles ont un chiffre d’affaires de plus de 5 millions d’euros.

Bpifrance accorde pour sa part de plus en plus de moyens au secteur, en capital mais aussi en financement.

Entre 2012 et 2015, nous avons soutenu la moitié des PME du secteur, avec tous nos outils d’intervention, pour un total de 260 millions d’euros. De 50 millions en 2012, nous avons atteint les 85 millions en 2015, soit une croissance de près de 70 % en 4 ans, ce qui est considérable. Nos interventions en faveur du secteur recouvrent donc une large palette d’outils financiers. Nous avons soutenu les PME à hauteur de 61 M€ sur 2012-2015 via des aides à l’innovation, soit individuelles (en collaboration avec l’ANSSI), soit via des appels à projets dédiés au titre du Programme des  Investissements d’Avenir « sécurité et résilience des réseaux, « sécurité numérique » et « protection et défense des systèmes d’information ».

Nous avons également financé les PME et ETI de la cybersécurité via des outils plus généralistes tels que des prêts (33 millions), des garanties aux banques qui prêtent aux entreprises (22 millions) et de la trésorerie en préfinancement (114 M€).

Enfin, nous avons également investi directement et indirectement (31 M€).

Consolider ce secteur est d’une nécessité absolue ! Nous observons et répondons à une accélération de la demande d’année en année. Mais ce secteur exige des investissements en capital plus importants encore dans les années à venir. Pour cela, nous pensons nécessaire la création de fonds dédiés à la cybersécurité, ou généralistes intégrant une stratégie dédiée à la sécurité informatique. Cela nécessitera bien sûr la mobilisation d’investisseurs corporate et institutionnels privés à nos côtés.

Success story

Talend développe des solutions Big Data et d’intégration Cloud qui permettent aux entreprises de tirer le meilleur parti de leurs données.

Après avoir investi fin 2013 dans l’éditeur de logiciels à l’occasion d’une levée de fonds, qui a permis à la société de poursuivre ses investissements technologiques et son développement commercial, Bpifrance se renforce dans la société à l’occasion de son introduction en bourse au Nasdaq.

Puissance de l’Europe

Notre rapprochement à venir avec la COFACE Direction des Garanties Publiques nous permettra d’élargir notre offre de services et de solutions. Ainsi, Bpifrance proposera prochainement aux entreprises les assurance-prospection, assurance-crédit et assurance-change. Le financement de l’export est aujourd’hui plus que jamais important et en particulier pour la cyber dont le terrain de jeu est inévitablement mondial.

Au-delà, les labels France cybersecurity et French tech vont apporter une dynamique et un gage de qualité supplémentaires aux entreprises françaises.

Nous travaillons enfin avec l’ensemble de notre écosystème, HEXATRUST, les grands donneurs d’ordre français et européens, les banques d’investissement publiques européennes, mais aussi avec le Fonds européen d’investissement et la Commission européenne… à l’émergence de nouvelles solutions communes.

Pour que nos entreprises “performent” sur le marché mondial dominé par les Américains et les Israéliens, il nous faut créer un marché cohérent. Il faut avoir une offre européenne qui participe à l’émergence de champions français sur la scène internationale.

Il n’y a pas de fatalité. Les signes à notre avantage se multiplient. L’Europe a fait de la cybersécurité l’une des priorités pour faire émerger un “marché unique du numérique”. La réglementation et les directives européennes vont obliger les entreprises, les administrations, etc., à se mettre en conformité…

La cybersécurité est l’un des axes sectoriels qui figurent au cœur de notre plan stratégique de Bpifrance pour 2016-2019. Nous travaillons notamment sur plusieurs projets de création de fonds dans ce segment de la cybersécurité. Des investissements financiers et corporate sont à l’ordre du jour et j’ai bon espoir de voir de nouvelles actions concrètes émerger au cours de l’année 2017. Je pense également que ce besoin mérite d’être porté au niveau européen, dans le cadre du plan Juncker.