La Préfecture de police de Paris : un rôle central au coeur des JO 2024

En charge de la mission de conseil, de coordination opérationnelle et de planification pluridisciplinaire au service du préfet de Police, le Commissaire Christophe Delaye, conseiller technique, chef du projet JO 2024 au cabinet du préfet de Police de Paris décrypte l’enjeu de sécurité de ces Jeux de 2024 d’une ampleur et d’une densité hors norme qui se dérouleront dans un futur incertain.

L’équivalent de 41 championnats du monde simultanés !

Maîtriser la densité, la durée et la diversité sont les trois enjeux de sécurité des Jeux. D’une durée globale de 60 à 90 jours (en y incluant les mesures préparatoires et le programme festif), les Jeux olympiques qui se dérouleront en France en 2024 s’étalent sur une période particulièrement longue, du double au triple comparé à l’Euro 2016 qui s’était déroulé sur 31 jours.

Après les 17 jours des JO qui débuteront le vendredi 26 juillet, suivra une phase intermédiaire de reconversion de 16 jours avant le début des Jeux Paralympiques qui se termineront le dimanche 08 septembre 2024. Au total ce sont près de 28 disciplines olympiques et 24 disciplines paralympiques qui vont s’enchainer, sans compter l’intégration de disciplines supplémentaires qui seront proposées au CIO fin 2020 soit l’équivalent de 41 championnats du monde se déroulant simultanément ! La maîtrise du caractère hors norme de l’évènement est donc un enjeu majeur qui nécessitera un dimensionnement de la sécurité sans nul autre pareil.

Un dispositif de sécurité étendu

En Ile-de-France, 26 sites olympiques de compétition et 45 sites d’entraînement seront déployés. 80% des sites seront dans un rayon de 10km autour du futur Village Olympique à Saint-Denis, schématiquement répartis sur deux zones : Paris-centre (Le Paris historique) et Grand-Paris (Seine-Saint-Denis). Deux nouvelles constructions verront le jour : un centre aquatique olympique de 15.000 places à Saint-Denis et l’Arena 2 de 8.000 places Porte de la Chapelle à Paris dans le 18e arrondissement.

Outre les zones stratégiques que seront les secteurs du Stade de France-CAO et de la Tour Eiffel-Champ de Mars-Trocadéro, épicentres des Jeux, deux autres objets nécessiteront une attention particulière : le Village Olympique qui hébergera 17.000 athlètes et officiels et le Centre Principal et village des Médias disposant d’une capacité d’hébergement de 1.300 logements qui se trouvera au Parc des Expositions du Bourget (93) pour les 20 à 25.000 journalistes internationaux accrédités.

Les hôtels officiels du CIO situés Porte Maillot, le Palais des Congrès, la Maison des Athlètes au Petit Palais, les pavillons de réception aménagés par les Nations et les partenaires marketing, dans et autour de Paris vont également nécessiter des dispositifs de sécurité adaptés.

La Seine autour de laquelle se situeront plusieurs constructions et plusieurs épreuves, sera donc le fil bleu de l’événement et un sujet d’attention pour les services de sécurité.

Près de 300000 personnes accréditées

Le défi de la diversité figure aussi en haut des priorités. Au total près de 300000 personnes seront accréditées, soit 3 fois plus que pour l’Euro 2016, parmi lesquels les 17.000 athlètes représentant 206 nations, 200.000 personnes contribuant à l’organisation et au bon déroulement des Jeux, dont 50.000 à 70.000 volontaires, les 20.000 à 25.000 journalistes internationaux accrédités et les quelques 90.000 officiels accrédités estimés (chiffre de Londres en 2012).

Quand aux téléspectateurs, ils sont estimés entre 4 à 5 milliards.

Au total près de 300000 personnes seront accréditées, soit 3 fois plus que pour l’Euro 2016.

Synonymes de sport, les Jeux sont, au-delà de la diversité des publics, une grande célébration avec une grande diversité de festivités. Paris sera en effet transformé en Parc Olympique pendant 3 mois. Les festivités débuteront le 21 juin, jour de la Fête de la Musique et dureront jusqu’au début du mois octobre qui consacrera la Nuit Blanche, la dernière soirée. 3 Live Sites seront situés au Trocadéro, au Parc de la Villette et au parc des Sports de Marville-La Courneuve pour la retransmission des compétitions et des concerts. Deux « allées olympiques » seront animées par des concerts, des événements culturels et des retransmissions, la Boucle de Seine et l’Allée des Lumières, le long des berges de la Seine et des grands monuments (Tour Eiffel, Concorde…) et des musées parisiens (Louvre, Orsay, Musée J. Chirac). Un site sera consacré à Marseille pour les épreuves de voile et 8 stades pour le football en province.

JO London 2012 : 2,5 à 3 millions de visiteurs étrangers, 11 millions de spectateurs dans les enceintes sportives (dont un tiers sont des visiteurs internationaux), 15 millions de personnes sur le parcours de la Flamme olympique et 8 millions de visiteurs dans les Live sites (concept des fans zones appliqué aux JO).

Des temps forts

A cette sécurisation globale et générale viendront s’ajouter plusieurs temps forts dont quatre cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux Olympiques et Paralympiques, en présence de dizaines de chefs d’Etat et de gouvernement étrangers, des athlètes et de milliers de spectateurs, en même temps que l’étape finale de la Flamme, devant des milliards de téléspectateurs ; et le Relais de la Flamme Olympique qui devrait commencer à sillonner le territoire français environ 100 jours avant le début des Jeux, pendant 3 mois, pour raconter une histoire jour après jour et encourager la croissance de la ferveur populaire.

Un plan de mobilité atypique et exceptionnel

Ce sont en effet 366 km de voies olympiques réparties entre 3 types de routes interconnectées, qui seront réservées aux véhicules de sécurité et de secours, aux véhicules militaires et aux véhicules accrédités.

121 km de voies permanentes seront activées quotidiennement de 06h00 à 24h00, un mois avant les Jeux jusqu’à leur terme afin que 85 % des athlètes soient situés à moins de 30 minutes de leurs sites de compétition. 245 km de voies « dynamiques » seront enfin activées selon le calendrier des épreuves et des arrivées dans les aéroports. Un objectif d’acheminement de 100% de la main d’œuvre et des spectateurs par les transports en commun, gratuitement (RATP, SNCF, Grand Paris Express) a également été fixé et 3 aéroports internationaux ont été désignés (Roissy-CDG, Orly, Le Bourget) pour réceptionner et accueillir les officiels et visiteurs.

Des responsabilités clairement établies en matière de sécurité
La responsabilité pour toutes les questions de sécurité liées aux Jeux (y compris les aspects financiers, opérationnels et de planification y afférents) incombe aux Autorités du Pays hôte, lesquelles prendront toutes les mesures nécessaires afin de garantir la tenue des Jeux dans la paix et la sécurité en 2024 (Art. 17 – 17.1. du contrat Ville-hôte, signé entre le CIO, le CNOSF et la Mairie de Paris, le 13 septembre 2017)

Les chapitres Sécurité des Livres I et III de la candidature, l’annexe technique Sécurité, les lettres de garanties signées par le Premier Ministre et les Ministres accompagnant le livre II et les conclusions du rapport de la commission d’évaluation du CIO venue à Paris en mai 2017 sont très engageants pour la France. Il y est notamment stipulé que toutes les forces de sécurité en France seront placées sous le commandement centralisé du Ministre français de l’Intérieur et que les opérations de sécurité dans toute l’Île-de-France relèveront, pour tous les domaines, de la juridiction du Préfet de Police de Paris, permettant ainsi d’avoir une structure de commandement unique.

Deux objectifs sont dès lors fixés par le CIO au Comité d’organisation Paris 2024 et au pays-hôte. En premier lieu, protéger les Jeux et les populations contre tous les types de risques, en intégrant la dimension internationale de l’événement et les menaces induites. Il va donc être nécessaire d’analyser les risques et d’identifier les menaces protéiformes (terrorisme, désobéissance civile, criminalité, accidents, ruptures des ressources technologiques, catastrophes naturelles, épidémies…).

Cela implique de très nombreux volets parmi lesquels l’anticipation des questions juridiques induites par les développements technologiques, mais aussi de garantir la sécurité juridique des procédures réglementaires et des équipements accueillant le public, l’information du gouvernement et les liaisons stratégiques, de prévenir le risque terroriste (conventionnel et NRBCe) et se donner les capacités de réagir en cas d’attaque, de concevoir une stratégie de sécurisation globale d’une multitude de sites et de populations, d’assurer les secours sur la voie publique et dans les installations sportives, de concevoir des plans de gestion des flux multiples (routiers, ferroviaires, fluviaux, aériens), d’assurer la sécurité particulière des personnalités et des compétiteurs, de garantir un suivi judiciaire à l’échelon national et à l’échelle de l’événement, d’organiser la coopération internationale, ou encore de concevoir des plans d’information des populations de toutes origines avant et pendant l’événement.

La maîtrise des budgets sera aussi un enjeu majeur tout comme préparer la reconversion après les Jeux des dispositifs déployés. Que faire des dispositifs lancés aux JO au profit de la sécurité nationale, quid de la gestion environnementale après les JO ou encore des personnels formés et mobilisés ? Dès aujourd’hui, se prépare donc aussi l’après 2024. La sécurité doit être by design et intégrée au coeur de la préparation des Jeux. La France doit donc s’emparer d’une culture de la planification et de l’anticipation dans les JO en matière de sécurité.

Autre objectif fixé par le CIO, celui d’utiliser les ressources de manière responsable, en s’appuyant sur l’existant et l’expérience des gestionnaires habituels des sites de compétition. Des ressources de sécurité estimatives considérables et contraintes pour chacune des phases font état, à ce stade des prévisions, de la mobilisation de près de 35.000 policiers et gendarmes, 10.000 militaires, 3.500 personnels de sécurité civile (pompiers, secouristes, démineurs) et 20.000 agents de sécurité privée dédiés à la sécurité des Jeux. Il faudra également recourir intensivement aux technologies, toujours évolutives, et garantir en permanence l’architecture et l’effectivité des communications.

De nouveaux enjeux émergent alors : le dimensionnement des forces de sécurité privée, tant qualitativement que quantitativement, les aspects règlementaires et législatifs, les besoins, les choix et la maturité des technologies innovantes mais déjà éprouvées, une coordination et une synergie des acteurs publics et privés, etc. Dès lors, il est essentiel de commencer rapidement la planification et identifier prioritairement les responsabilités financières et fonctionnelles, ainsi que les modifications législatives nécessaires ; de penser la coordination et la synergie des acteurs publics et privés et la stabilité des personnels-clé de la préparation.

Un calendrier rythmé

9 mois après l’attribution des JO, La France semble bien avancée. Les opérations vont commencer à partir de la rentrée 2018, avec la phase de planification conceptuelle, qui durera environ 2 années, jusqu’aux JO de Tokyo. S’en suivra une phase de planification puis de mise en œuvre opérationnelle, d’une durée de 4 années.

A l’échéance 2021, les futurs documents cadres devront être finalisés avec une analyse de risques sur le modèle de la norme ISO 31000 et un plan directeur de sécurité des Jeux, un concept et des plans des opérations des sites. La billetterie sera lancée en 2022, et les test events se dérouleront en 2023, date à laquelle la France devra être prête !