Une cyberattaque d’ampleur contre l’Ukraine : le dessous des cartes des accords de Minsk…

Série Russie – UE : opus 1

Au lendemain de la fin des pourparlers entre la Russie, les Etats-Unis et l’OTAN, l’Ukraine a subi une cyber attaque d’ampleur : 70 sites gouvernementaux visés et 10 d’entre eux piratés. Tous les regards se sont alors tournés vers Moscou, érigé en principal suspect. Dimanche 15 janvier, Kiev accuse officiellement la Russie d’être l’auteur de cette attaque affirmant disposer de preuves. Alors que l’UE s’inquiète de plus en plus de l’escalade des tensions entre les deux pays, retour sur les raisons cachées de cette cyber attaque ?

L’utilisation dun procédé classique

Le procédé utilisé pour cette cyber attaque est somme toute assez classique. Microsoft a en effet annoncé dans un billet : « Des douzaines d’entités gouvernementales, des ONG et des groupes médiatiques, tous situés en Ukraine, ont été infectés par ce logiciel malveillant qui faisaient semblant d’exiger le paiement d’une rançon afin de rendre le contrôle des serveurs informatiques impactés ». Aucun moyen de paiement pour la rançon n’est communiqué. Le virus est en réalité un virus destructeur de données.

Un message politique caché ?

A la suite de cette attaque, Moscou apparaît comme le suspect numéro 1 en raison du contexte géopolitique particulièrement tendu entre les deux pays. Le porte-parole de Vladimir Poutine a nié toute responsabilité dans cette attaque alors même que Kiev a officiellement pointé du doigt la Russie. Du côté américain, Jake Sullivan, le conseiller pour les questions de sécurité nationale du président américain Joe Biden a déclaré à la télévision américaine : « Nous travaillons actuellement à l’attribution de ces attaques. Mais il est vrai que je ne serais pas étonné de découvrir qu’elles ont été organisées par la Russie ». Le ministre ukrainien de la Transformation numérique voit en cette cyber attaque « une manifestation de la guerre hybride que la Russie mène contre l’Ukraine depuis 2014 » consistant à intimider la société civile mais aussi à saper « la confiance [de la population] dans le pouvoir ».

Après les cyberattaques perpétrées par la Russie en 2015 et 2017, cette nouvelle attaque apparait comme un message d’intimidation fort et un moyen de pression diplomatique pour la Russie. Cette cyber attaque pourrait être un aperçu des potentiels dégâts que les Russes infligeraient à l’Ukraine si les Occidentaux n’acceptaient pas leurs nombreuses conditions.

Un signe avant-coureur avant une invasion ?

L’attitude offensive des forces armées russes sur le front occidental ne se limite pas aux frontières ukrainiennes. La Norvège et ses services gouvernementaux ont fait les frais d’une cyber attaque russe à la mi-janvier, après qu’un câble sous-marin reliant le pays à l’une de ses stations satellites arctiques ait été sectionné. La Suède a envoyé des renforts sur l’île de Gotland, face à l’activité russe en mer Baltique, alors même que des drones non-identifiés ont survolé les centrales nucléaires du pays et d’autres points d’importance stratégique. La Finlande, elle, a rehaussé son niveau de préparation et d’alerte. Ajoutons à cela le fait que chacun des pays baltes, ainsi que la Suède, ont fait le choix d’envoyer des armes à l’Ukraine pour sa défense. La Russie aurait-elle donc été tentée de mener des actions de diversion dans la région ? Ce, dans le but d’accaparer l’attention des pays baltes et nordiques loin des frontières ukrainiennes ? La question mérite au moins d’être posée. Le rapprochement des troupes russes de la frontière ukrainienne où près de 120 000 soldats sont entassés fait craindre une invasion au peuple ukrainien qui assiste, impuissant, à l’escalade des tensions entre les deux pays.

Igor Delanoë, directeur adjoint de l’Observatoire franco-russe, ne croit pas en une invasion massive des troupes russes jusqu’à Kiev. « En revanche on peut imaginer des coups de force beaucoup plus succinct et des frappes ciblées sur des infrastructures ukrainiennes comme des dépôts de munitions par exemple. Le but serait ainsi de dégrader les potentiels militaires de l’armée ukrainienne et l’affaiblir considérablement avec des incursions temporaires. Le retrait des troupes s’effectuerait ensuite, en contrepartie de la mise en œuvre effective du volet politique des accords de Minsk auquel l’Ukraine se refuse jusqu’à présent alors même qu’ils ont signé ces accords. »

L’avenir de l’Ukraine reste plus que jamais incertain alors même que des négociations entre Américains et Russes ont repris vendredi dernier avec la ferme intention, du côté Russe, de faire que l’Ukraine ne puisse jamais rejoindre l’OTAN.