Athlètes et militaires : une vie pleine de sens et d’engagement

L’esprit d’équipe, l’engagement de soi, la combativité et le courage sont autant de valeurs qui s’appliquent aussi bien aux sportifs qu’aux militaires. L’athlète comme le soldat doit être prêt psychologiquement et physiquement à l’épreuve qui l’attend. Si les risques encourus ne sont pas les mêmes, leur choix de vie exigeant mêle rigueur et sacrifice.

Par Hugo Champion

Le sport : pilier de la préparation opérationnelle

Le ministère des Armées a instauré en 2014 une nouvelle politique des sports qui permet de conforter cette discipline comme pilier de la préparation individuelle et collective des armées mais aussi comme un véritable outil de cohésion sociale et de santé publique en développant la pratique sportive pour tous. Confrontés à des missions de plus en plus exigeantes sur les théâtres d’opérations extérieures ou sur le sol national, les soldats ont le devoir de cultiver leurs aptitudes pour remplir leurs missions au travers d’une préparation physique et psychologique exigeante. « Aujourd’hui, le soldat est un athlète complet (…). Cela repose notamment sur deux piliers : le physique et la force mentale », souligne Hervé Piccirillo, arbitre de football français, commissaire aux sports militaires et commandant du centre national des sports de la défense (CNSD) et d’ajouter : « Le CNSD dispense 58 stages par an au profit de 850 candidats portant essentiellement sur la spécialisation de moniteurs et d’instructeurs en entraînement physique militaire et sportif (EPMS) mais également en techniques d’interventions opérationnelles rapprochées (TIOR), en techniques d’optimisation du potentiel (TOP) et en préparation physique opérationnelle (PPO) ». Le plan « Sport 2025 » renforce également le taux de féminisation des formations moniteurs, en passant à 16% en 2019-2020 contre 8% en 2018-2019. L’entraînement physique du combattant est, depuis toujours, indissociable de la préparation opérationnelle. « L’EPMS est un facteur déterminant de l’aptitude à combattre dans un milieu dégradé », affirme le bureau emploi de l’état-major de l’armée de Terre. La préparation physique vient alors renforcer le développement de l’esprit guerrier du combattant autour des qualités d’audace, de résilience, de rusticité et d’intrépidité.

Le sport et la défense : des valeurs qui rassemblent

« Le sport et les armées portent en eux des valeurs universelles communes », souligne Hervé Piccirillo.La pratique du sport militaire accorde une large place aux valeurs morales et individuelles comme le goût de l’action, le goût de l’effort, le dépassement de soi, la résistance à la souffrance, le courage et des valeurs à caractère social, le don de soi, le respect d’autrui, de l’adversaire, du groupe, le sens de la discipline. Cynthia Vescan, Vice-championne d’Europe junior en 2009, 2010 et 2011 de lutte témoigne : « J’ai choisi l’armée de Terre car on y retrouve les valeurs communes de sacrifice, de la défense de la France, de respect, de courage et de dépassement de soi ». Des valeurs partagées par le monde exigeant du sport d’élite. Pour Alain Bernard, maréchal des logis, triple médaillé Olympique aux JO de Pékin 2008 : « les Jeux olympiques et la gendarmerie ont des valeurs communes comme l’engagement et le dévouement. Lors des Jeux, la joie et le plaisir doivent primer ».

Une telle compétition décuple l’énergie et la motivation des militaires de haut niveau. « Je reviens d’une grosse blessure au tendon rotulien. Je n’ai repris l’entraînement que début juin. Après un an d’arrêt, ça a été dur de revenir à la compétition. Mais je suis plus motivé que jamais », assure le brigadier Leslie Djhone, spécialiste des 200 et 400 m. Ces épreuves emblématiques représentent aussi la consécration d’années d’entraînement et de choix de vie difficile. « Les Jeux olympiques de Londres représentent à mes yeux la concrétisation d’années de travail, de souffrances, de doutes et de sacrifices », confirme l’aspirante Elodie Guégan, spécialiste du demi-fond.

Une armée de Champions

La professionnalisation des armées a conduit à la mise en place d’un dispositif spécifique regroupant les Sportifs de haut niveau de la Défense (SHND).

Composée de cent quinze sportifs de haut niveau dont quinze en situation de handicap, militaires dans les unités des trois armées, de la gendarmerie et des services, cette « Armée de Champions » est placée sous la responsabilité du commissaire aux sports militaires. Elle forme plus de 20 équipes de France militaires en sports individuels, collectifs et handisport. Le ministère des Armées est ainsi le plus grand contributeur français au soutien du sport de haut niveau. « Le maintien en condition physique est un devoir, les bienfaits de la pratique sportive vont bien au-delà du bon accomplissement du service. Alors que nous avons la chance de posséder la qualité de sportifs de haut niveau de la Défense, nous contribuons également au rayonnement de l’Institution et à la promotion des valeurs humaines partagées. » témoigne l’un des membres de l’équipe sportive militaire de haut niveau de la gendarmerie. Et le soldat Michel Cornu, médaillé d’argent à l’épreuve de bloc d’escalade aux Jeux mondiaux militaires d’hiver de Sochi qui a rejoint le SHND en 2017 d’ajouter « J’ai été fier de représenter la France et les valeurs de cohésion de l’armée ».

« Ces sportifs sont en effet une fierté pour l’institution. Ils portent les couleurs de nos armées et de la gendarmerie nationale, et participent au rayonnement de la France à l’étranger lors de compétitions internationales et des Jeux Olympiques et paralympiques. » ajoute le CNSD. Depuis la mise en place du dispositif du sport de haut niveau en 2003, ils ont remporté 77 médailles olympiques et paralympiques, dont 31 titres. Aux Jeux Olympiques d’été de Rio en 2016, ils ont décroché 30 % des médailles d’or de la délégation française et 80 % de médailles d’or aux Jeux Olympiques d’hiver de Pyeongchang en 2018. Aux Jeux Paralympiques 2018, 100 % des médailles d’or sont tombées dans l’escarcelle de la Défense.

La réinsertion des militaires blessés par le sport

Le troisième axe stratégique de la gouvernance du plan « Sport 2025 » consacre la reconstruction et la réinsertion des blessés par la pratique sportive. Le durcissement des opérations, observé depuis l’engagement des forces françaises en Afghanistan, a entraîné l’augmentation des blessés physiques mais également psychiques. Très actif, le ministère des Armées se veut reconnaissant des sacrifices consentis et des souffrances éprouvées par ses militaires. « La France a le devoir de les assister et de les accompagner dans leur parcours de réadaptation et de réinsertion sociale et professionnelle. » souligne le CNSD. Instrument de redécouverte du corps, le sport favorise le dépassement de soi, encourage les liens sociaux et la solidarité, et permet de lutter contre le stress et l’isolement.

Le ministère des Sports a renouvelé son attachement à cette politique spécifique du ministère des Armées. « 50 activités ont été organisées au profit de nos blessés en 2019, sur tout le territoire, et plus de 25 stages sportifs. Les futurs cadres de la filière sportive militaire sont tous sensibilisés au handisport. Pour mener ces missions, nous avons des liens étroits avec la Fédération Française Handisport, le comité paralympique, le ministère des Sports, les fédérations sportives et bien sûr le service de santé et les cellules d’aide des Armées, les associations, etc. », explique le capitaine Erwan, chef du département blessés militaires et sport. D’autres initiatives éclosent comme la création du programme sportif des Rencontres militaires blessures et sports (RMBS), l’organisation du Challenge Ad Victoriam, la préparation physique aux Invictus Games et aux Jeux mondiaux militaires. La France devrait également accueillir les Heroes Military Games en 2021, événement international pour lequel les blessés suivent une préparation physique exigeante. « Le sport est un outil extraordinaire de reconstruction. Il permet de repousser les barrières du handicap mais aussi de réparer des blessures plus insidieuses », rappelle Hervé Piccirillo.

Quant aux champions, ils sont aussi mis à l’honneur lors de nombreuses compétitions handisport. Une délégation de militaires blessés a participé pour la première fois aux Jeux mondiaux militaires d’été de 2015 en Corée du Sud et aux éditions des Invictus Games de 2014 à Londres, 2016 à Orlando, 2017 à Toronto et Sydney en 2018. Pour les Jeux Paralympiques, « l’intégration d’athlètes handisport est assez récente. Elle date de 2015. A cette époque, le thème de la reconstruction des blessés militaires par le sport est devenu un thème majeur », explique Hervé Piccirillo. En 2016, un militaire blessé a participé aux Jeux Paralympiques de Rio en para-canoë. La cohésion et la force morale sont les ressorts de la compétition ; elles permettent de prendre l’ascendant et mènent à la victoire qui est toujours une œuvre collective. « Quand je suis sur les pistes de compétition, je pense très fort aux camarades en opération et c’est très motivant pour nous de savoir qu’on n’est pas tout seul et que toutes les armées sont derrière nous », témoigne Maxime Montaggioni, sacré champion du monde de banked slalom en 2019. D’autres militaires blessés sont pressentis pour les Jeux de Tokyo, en 2021.

Le sport pour tous, outil de cohésion sociale

Le sport sert également à fédérer toute une nation et permet de « développer des liens essentiels entre la jeunesse française et l’armée », rappelle Hervé Piccirillo. Objectif commun également porté par le comité d’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 qui souhaite promouvoir la pratique du sport pour tous, ses valeurs universelles, mais aussi séduire la jeunesse, et inviter les spectateurs à faire partie de la fête olympique « Pour la première fois dans l’histoire des Jeux, les spectateurs deviendront acteurs », promet Tony Estanguet. Le grand public sera convié à participer à un marathon et pourra se confronter aux « vrais » concurrents par la magie des nouvelles technologies. Les 4 sports additionnels : le surf, le skateboard, l’escalade et le breakdance devraient également séduire un public jeune. Tony Estanguet, président du comité d’organisation et l’ensemble du COJO veulent ainsi des Jeux plus « en phase avec leurs goûts et leur mode de vie. » et, au-delà, les inciter à se mettre au sport en invitant, dans le programme, les disciplines les plus proches de leur univers, « Les sports les plus actifs sur les réseaux sociaux ». Facteur déterminant de bonne santé, le sport pour tous représente un levier pour promouvoir l’égalité hommes/femmes et permet de lutter contre toute forme de discrimination.

De leurs côtés, les Armées misent aussi sur le renforcement du lien Armées-Nation en organisant des actions sportives locales entre les armées, les collectivités territoriales et les fédérations sportives à l’image du Service national universel qui encourage la « cohésion nationale » et la construction d’une « société d’engagement », des journées « Sport armées-jeunesse » ou encore de la Journée Défense et Citoyenneté (JDC), qui s’impose à l’ensemble des Français de 16 à 25 ans. En mai 2018, de jeunes Nancéiens ont eu l’opportunité d’effectuer leur JDC dans les locaux de l’Association sportive Nancy-Lorraine (ASNL) au stade Marcel Picot. Une journée qui s’est achevée par la rencontre de football de Ligue 2 entre l’AS Nancy-Lorraine et l’US Orléans à laquelle les jeunes ont assisté. L’armée et les sportifs du stade nancéiens ont ainsi présenté à la jeune génération les valeurs communes aux mondes du sport et militaire.

La réforme de la gouvernance du sport français, avec la création de l’Agence nationale du sport, conjuguée à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, marque une nouvelle ère du sport français. Le ministère des Armées, le ministère de l’Intérieur (gendarmerie nationale), le ministère des Sports et la secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées s’engagent à développer des actions communes en faveur du sport de haut niveau français, visant à la réussite des JOP 2024 en France. La perspective de cet évènement extraordinaire constitue une conjoncture favorable pour consolider la contribution du ministère des Armées et du ministère de l’Intérieur au sport de haut niveau, et afficher de nouveaux objectifs communs. Nos militaires et athlètes ne manqueront pas de briller en 2024, soutenus par toute une Nation faisant honneur aux valeurs du sport olympique. « Le but de l’Olympisme est de mettre le sport au service du développement harmonieux de l’humanité en vue de promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine. […] »